CotentinDiffusion, 9 Rue Croix d' Ăpines, 50390, Saint-Sauveur-le-Vicomte, Normandie, +33 2 33 41 78 52: directions, commentaires, contacts.
Olivier TrĂ©het Texte intĂ©gral 1 Voir la synthĂšse de Jean Chagniot, Guerre et sociĂ©tĂ© Ă lâĂ©poque moderne, Paris, PUF, 2001, au chap ... 2 John. A. Lynn, Giant of the Grand SiĂšcle. The French Army, 1610-1715, Cambridge, Cambridge Univers ... 3 David Parrott, Richelieuâs Army. War, Government and Society in France, 1624-1642, Cambridge, Camb ... 4 Guy Rowlands, The Dynastic State and the Army under Louis XIV. Royal Service and Private Interest, ... 5 On peut citer les ouvrages de Jean-Marie Constant, La noblesse française aux XVIe et XVIIe siĂšcles ... 6 James B. Wood, The Nobility of The Ălection of Bayeux 1463-1666. Continuity through Change, Prin ... 1Le XVIIe siĂšcle est marquĂ© par de grandes mutations, tant pour lâarmĂ©e et lâinstitution militaire en gĂ©nĂ©ral que pour la noblesse. En effet, dâune part, depuis une vingtaine dâannĂ©es, toute une gĂ©nĂ©ration dâhistoriens, tant français quâanglo-saxons, a questionnĂ© le concept de rĂ©volution militaire » pour rĂ©pondre Ă une problĂ©matique plus gĂ©nĂ©rale sur la construction de lâĂtat dit moderne1. Ainsi, pour les seuls rĂšgnes de Louis XIII et de Louis XIV, les publications de John A. Lynn2, de David Parrott3 et de Guy Rowlands4 sont-elles dĂ©sormais devenues incontournables. Dâautre part, la noblesse française, un temps dĂ©laissĂ©e puis remise Ă lâĂ©tude par lâapproche novatrice de Jean Meyer, fait lâobjet dâun renouveau bibliographique important, avec les recherches de Jean-Marie Constant, de Laurent Bourquin et de Michel Nassiet entre autres, diffusĂ©es dans des synthĂšses rĂ©centes5. Pour la Normandie, câest le travail de James B. Wood6 sur lâĂ©lection de Bayeux, qui remonte Ă 1980 qui sert dâĂ©tude de rĂ©fĂ©rence. 7 On peut citer les articles dâAndrĂ© Corvisier, La noblesse militaire aspects militaires de la n ... 8 AndrĂ© Corvisier, Les contrĂŽles de troupes de lâAncien RĂ©gime, Vincennes, ministĂšre de la DĂ©fense, ... 9 HervĂ© DrĂ©villon, LâimpĂŽt du sang. Le mĂ©tier des armes sous Louis XIV, Paris, Tallandier, 2005, don ... 2Et la noblesse aux armĂ©es ? Ă la croisĂ©e de ces deux grands axes de recherche, les publications se font plus rares7. Car de fait les sources permettant des enquĂȘtes systĂ©matiques sur lâengagement des gentilshommes dans les armĂ©es font dĂ©faut. Du moins avant le dernier quart du siĂšcle. Au Service historique de la DĂ©fense, fonds de lâarmĂ©e de terre SHD les dossiers personnels des officiers ne commencent guĂšre avant 1690 ils ont Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s entre autres par Guy Rowlands, les registres dâadmission aux Invalides sâouvrent en 1670 et les contrĂŽles des rĂ©giments tant dâinfanterie que de cavalerie ne sont disponibles quâĂ partir du tout dĂ©but du XVIIIe siĂšcle8. DâoĂč lâapport prĂ©cieux des travaux dâHervĂ© DrĂ©villon, proposant une synthĂšse rĂ©cente, parue en 2005, contenant un chapitre intitulĂ© Noblesse au service, noblesse de service9 ». 3Câest dans ce cadre gĂ©nĂ©ral que nous allons tenter de prĂ©senter lâengagement de la noblesse du Cotentin dans les armĂ©es au XVIIe siĂšcle. Mais prĂ©cisons tout dâabord le sujet car ce thĂšme serait trop vaste pour tenir dans le cadre de cet article. Dâune part, quâentendons-nous par Cotentin au XVIIe siĂšcle ? Il sâagit en fait de lâĂ©tendue couverte par le grand bailliage de Cotentin. La province de Normandie est alors divisĂ©e en trois gĂ©nĂ©ralitĂ©s et en sept bailliages. La gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen nâen contient que deux celui de Caen et celui de Cotentin. Le bailliage ou grand bailliage de Cotentin est lui-mĂȘme subdivisĂ© en six Ă©lections, du moins en 1640 celles de Valognes, de Carentan, de Saint-LĂŽ, de Coutances, dâAvranches et celle Ă©phĂ©mĂšre de Saint-Sauveur-Lendelin. Le bailliage de Cotentin couvre donc un espace plus vaste que le Cotentin au sens purement gĂ©ographique, mais plus petit que lâactuel dĂ©partement de la Manche. Certes, lâĂ©lection de Saint-LĂŽ sâĂ©tend dans lâactuel dĂ©partement du Calvados, mais le bailliage de Cotentin ne contient pas le pays de Villedieu, compris dans lâĂ©lection de Vire ni le comtĂ© de Mortain, possession des OrlĂ©ans. Dâautre part, nous limitons lâĂ©tendue chronologique de cette Ă©tude au deuxiĂšme tiers du XVIIe siĂšcle. En effet, mĂȘme encore dans les premiĂšres annĂ©es du rĂšgne de Louis XIII les sources, y compris celles des archives dĂ©partementales de la Manche comme du Calvados sont extrĂȘmement lacunaires. Et, Ă partir des annĂ©es 1670, lâinstitution militaire connaĂźt de grandes mutations et impose alors Ă lâhistorien de nouvelles problĂ©matiques. 4Tenant compte des problĂ©matiques actuelles et des sources disponibles, nous avons retenu les principaux temps forts et les grandes prĂ©occupations de la noblesse aux armĂ©es, depuis le ban et lâarriĂšre-ban, le dĂ©part et la campagne militaire elle-mĂȘme, la recherche du fait dâarmes et le service Ă lâĂ©tranger jusquâaux soucis pour la parentĂšle et les assauts roturiers en vue de lâanoblissement. Le ban et lâarriĂšre-ban 10 D. Parrott, Richelieuâs Army [âŠ], op. cit., p. 63. 5Câest pour pallier le grave dĂ©ficit de cavalerie face Ă lâarmĂ©e espagnole que Richelieu a recours Ă la levĂ©e du ban et de lâarriĂšre-ban en 1635 et 1636. Le dĂ©sĂ©quilibre des forces Ă©tait, en effet, flagrant David Parrott relĂšve quâen juillet 1636, Ă 5 000 cavaliers espagnols les Français ne purent opposer que 150 chevaux ! Aussi, le cardinal compte-t-il sur lâaide des gentilshommes du royaume, rĂ©pondant Ă lâappel de ce vieux service fĂ©odal et censĂ©s se prĂ©senter avec tout lâĂ©quipement militaire nĂ©cessaire et Ă cheval bien sĂ»r, comme il sied Ă leur rang. Le cardinal confiant en attend un renfort important Dans le 20e de ce mois, Ms dâAngoulesme et de La Force seront fortifiez du regiment de cavalerie de Matignon et de plus de 2 500 gentilshommes10. » 11 Gustave Dupont, Histoire du Cotentin et de ses Ăźles, Caen, Le Blanc-Hardel, 1870-1885, t. 4, p. 78 ... 12 AD du Calvados, Fonds Petitville, 1 F 352 1635. 6Quâen est-il pour le bailliage du Cotentin ? La revue des gentilshommes est passĂ©e le 27 aoĂ»t 1635 Ă Coutances par le bailli RenĂ© Le Cesne, seigneur de Pont-Rilly. On ne possĂšde malheureusement pas la liste de ceux ayant rĂ©pondu Ă la convocation, mais Gustave Dupont estime leur nombre Ă 80011. Combien ne sây sont pas rendus, malgrĂ© les risques de confiscation du ou des fiefs ? Il nâest guĂšre possible de le savoir. En revanche, lĂ comme ailleurs, un certain nombre de gentilshommes se font remplacer pour ce service. Charles de Billeheust, sieur de Beaumanoir ĂągĂ© de 20 ans sert ainsi pour son pĂšre et pour son oncle, ĂągĂ©s tous deux de prĂšs de 60 ans et Pierre Le Roy, sieur de BrĂ©e retenu au lit par maladie » se fait remplacer par un autre gentilhomme Charles Lecomte, sieur du Bouret12. Ă Coutances, ces troupes du ban et de lâarriĂšre-ban apprennent quâelles vont aller rejoindre lâarmĂ©e du duc de La Force en Lorraine ce qui, semble-t-il, entraĂźne quelques dĂ©sertions⊠Quelques jours aprĂšs le 27 aoĂ»t, les gentilshommes du Cotentin rejoignent ceux des autres bailliages de Normandie Ă Ăvreux. Et câest le 15 septembre que le contingent normand arrive Ă ChĂąlons-en-Champagne. 13 JoĂ«l Cornette, Les annĂ©es cardinales. Chronique de la France, 1599-1652, Paris, Sedes, 2000, p. 27 ... 7Mais lâoptimisme initial de Richelieu va vite retomber face au rĂ©sultat rĂ©el de cette levĂ©e. Ces gentilshommes se montrent turbulents, plutĂŽt indisciplinĂ©s et trĂšs sourcilleux du respect de la hiĂ©rarchie nobiliaire et donc des droits au commandement ! Il est clair alors que pour eux la naissance prime sur la compĂ©tence. MĂȘme Louis XIII en est fort irritĂ©. Il Ă©crit ainsi le 4 octobre 1635 Quand on les veut envoyer seulement Ă trois heures dâici [âŠ] ils disent tout haut quâon les veut perdre et quâils sâen iront. [âŠ] Depuis hier, nous avons perdu huit Ă neuf cents chevaux de noblesse, quelles que harangues, promesses, flatteries, menaces que je leur aie pu faire13 ! » 14 D. Parrott, Richelieuâs Army [âŠ], op. cit., p. 63. 15 MĂ©moires de Henri de Campion, Marc Fumaroli Ă©d., Paris, Mercure de France, 1990, p. 81. 16 Charly Guilmard, MĂ©moire gĂ©nĂ©alogique sur la maison de Billeheust, Valognes, chez lâauteur, 2007, ... 8Et, de fait, dâune part les troupes levĂ©es lors du ban et de lâarriĂšre-ban de 1635 sont beaucoup moins nombreuses que prĂ©vu, mĂȘme si David Parrott ne peut donner de chiffres prĂ©cis14. Le gentilhomme normand Henri de Campion, dĂ©jĂ en Champagne avec son rĂ©giment, se fĂ©licite quant Ă lui dâun renfort de quinze cents gentilshommes de Normandie, bien montĂ©s et fort dorĂ©s15 », mais peut-ĂȘtre la joie de revoir quelques compatriotes nâest-elle pas Ă©trangĂšre Ă ce tableau flatteur. Dâautre part, comme le dĂ©plore Louis XIII, un certain nombre de ces gentilshommes sâen retournent chez eux bien vite ! Quelques certificats de service, dĂ»ment signĂ©s par le chef de corps et pieusement conservĂ©s dans des archives familiales en attestent. Celui de Charles de Billeheust, dĂ©jĂ citĂ© ci-dessus, certifiant que ce gentilhomme sâest trouvĂ© avec armes et chevaux pour le service du roi16 » signĂ© par le bailli de Cotentin, Le Cesne, date du 7 octobre 1635⊠Il semble que dans tous les cas ces gentilshommes Ă©taient rentrĂ©s chez eux pour la Saint-Martin 11 novembre. 17 Service historique de la DĂ©fense dorĂ©navant notĂ© SHD A1 30, fo 337, 27 novembre 1636. Lettre cit ... 9Le cardinal va tout de mĂȘme convoquer de nouveau le ban et lâarriĂšre-ban lâannĂ©e suivante, en 1636. Mais le degrĂ© de mobilisation de ces gentilshommes est encore plus faible et irrĂ©gulier dâune rĂ©gion Ă lâautre⊠sauf pour la Normandie ! La proximitĂ© des zones de combat les Espagnols sont alors en Picardie et la promesse faite par le duc de Longueville, gouverneur de la province, de ne pas servir au-delĂ des frontiĂšres du royaume y sont peut-ĂȘtre pour quelque chose. Toujours est-il que Louis XIII apprĂ©cie suffisamment le service rendu par ces gentilshommes normands pour leur Ă©crire une lettre de satisfaction17. 18 PubliĂ©e partiellement par RenĂ© de BrĂ©bisson, Ătats des nobles et des anoblis dans les neuf Ă©lect ... 19 GĂ©rard Mauduech, Recherche de noblesse de dâAligre 1634, publication multigraphiĂ©e, archives dĂ©p ... 20 Copie manuscrite des deux rĂŽles consultable aux AD de la Manche, 1 Mi 395, R 10, fo 31-45. 21 Hippolyte Sauvage, La recherche de Paris intendant de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, 1624 », Notices, mĂ© ... 22 Ce rĂŽle a Ă©tĂ© publiĂ© dans les Notices, mĂ©moires et documents, t. 11, 1893, p. 2-89. 10Pour ce qui concerne le Cotentin, peut-on essayer dâĂ©valuer plus prĂ©cisĂ©ment le nombre de ces gentilshommes ? Câest paradoxalement pour la premiĂšre moitiĂ© du XVIIe siĂšcle que les documents sont les plus nombreux et prĂ©cis pour recenser la noblesse. La recherche de noblesse de lâintendant Roissy date de 1598-159918 et celle de dâAligre de 1634-163519. Deux rĂŽles de 1628 donnent la liste des gentilshommes, mais pour les seules vicomtĂ©s de Valognes et dâAvranches20. Une recherche a aussi Ă©tĂ© effectuĂ©e pour lâĂ©lection de Carentan en 162421. Enfin, un rĂŽle exceptionnel, complet et trĂšs bien renseignĂ© a Ă©tĂ© dressĂ© en 1640 pour recenser les gentilshommes et surtout noter leur fidĂ©litĂ©, un an aprĂšs la terrible rĂ©volte des Nu-Pieds22. Câest ce dernier rĂŽle qui va nous servir de base. NĂ©anmoins, ces rĂŽles nâĂ©tant pas exempts dâinexactitudes ou dâomissions, par exemple en ce qui concerne les enfants mineurs, mais en Ăąge tout de mĂȘme dâĂȘtre armĂ©s, on ne donnera que des ordres de grandeur. 11Pour les six vicomtĂ©s du Cotentin, on compte prĂšs de 1 500 gentilshommes majeurs en 1640. Sur ce total, seuls 380 sont recensĂ©s comme portant lâĂ©pĂ©e, soit 25 % du total. Ce chiffre est sans doute lĂ©gĂšrement sous-estimĂ©, Ă cause de renseignements parfois trop laconiques comme la mention de mesme ». On peut donc corriger ce premier pourcentage et estimer les gentilshommes dans les armĂ©es Ă un tiers du total. Cette proportion est dâailleurs presque identique pour chacune des vicomtĂ©s. Les autres gentilshommes sont soit pourvus dâun office de judicature, soit ĂągĂ©s, soit hommes de repos » soit, le plus souvent, pauvres. 23 J. B. Wood, The Nobility of the Election of Bayeux [âŠ], op. cit., p. 77-78. 24 L. Bourquin, Les carriĂšres militaires de la noblesse au XVIIe siĂšcle reprĂ©sentations et engage ... 12On peut essayer de comparer cette proportion de gentilshommes en armes avec celle dâautres rĂ©gions. James B. Wood estime Ă 32 % le nombre de chefs de familles nobles de lâĂ©lection de Bayeux servant dans les armĂ©es en 163923. En Champagne, Laurent Bourquin chiffre Ă 17,5 % le nombre de lignages de gentilshommes prĂ©sents aux armĂ©es sous le rĂšgne de Louis XIII24. Pour le Cotentin, si lâon sâen tient aux gentilshommes recensĂ©s en 1639, pouvant parfois appartenir aux mĂȘmes lignages mais sans compter leurs enfants, les taux varient, en fonction des vicomtĂ©s, de 15 Ă 27 %. 25 J. A. Lynn, Giant of the Grand SiĂšcle [âŠ], op. cit., p. 369. 13Toujours est-il que, pour conclure sur ce service fĂ©odal, le ban et lâarriĂšre-ban ne jouent plus, dans les armĂ©es du XVIIe siĂšcle quâun rĂŽle de plus en plus minime. Voire, comme le souligne John Lynn, un rĂŽle souvent plus tragique ou comique quâhĂ©roĂŻque25 ». Partir servir le Roi » 26 L. Bourquin, art. citĂ©, p. 273-277. 14Au XVIIe siĂšcle, le prestige du service du Roi » est toujours aussi grand chez les gentilshommes. Certes, le propos est Ă nuancer, car, comme lâĂ©crit justement Laurent Bourquin, lâidĂ©al chevaleresque est malmenĂ© lors des guerres de Religion. Cependant, il semble reprendre de la vigueur sous Henri IV et Louis XIII26. Une grande partie des gentilshommes dĂ©sire donc partir Ă la guerre, mais le service du Roi » coĂ»te cher. Il exclut ainsi un grand nombre dâentre eux. Dans le rĂŽle de 1640, de nombreux gentilshommes sont rĂ©fĂ©rencĂ©s homme de peu », peu riche », homme de rien » ou pauvre ». Pour la vicomtĂ© dâAvranches, ces quatre mentions renseignent prĂšs de 45 % des gentilshommes citĂ©s, auxquels il faudrait rajouter ceux indiquĂ©s comme porte lâĂ©pĂ©e, pauvre » ou porte lâĂ©pĂ©e, peu riche », sans doute Ă la limite de pouvoir sâarmer pour partir Ă la guerre, ce qui fait monter le total Ă 55 % de la noblesse de la vicomtĂ©. 27 Inventaire du chartrier Simon du Buisson », Publications multigraphiĂ©es de la SociĂ©tĂ© dâarchĂ©ol ... 15Car partir Ă la guerre, câest aussi sâĂ©quiper. Les frais dâĂ©quipage sont certes moins Ă©levĂ©s pour lâinfanterie que pour la cavalerie, mais il faut aussi payer le voyage pour rejoindre son rĂ©giment. Toutes ces dĂ©penses peuvent mettre le gentilhomme de petite fortune dans lâembarras. Dans un acte de 1636, Michel Simon, sieur du Buisson, de la vicomtĂ© de Valognes, remontre quâil est sur son partir pour aller au service du Roy [âŠ] mais Ă raison quâil luy est nĂ©cessaire dâavoir de lâargent pour sâĂ©quiper et ayder aux frais du voyage et quâil ne luy en est point deub que par Jacques et Jean Goueslain, fermiers de lâintĂ©gritĂ© de son bien27 », il obtient dâeux lâavancement du paiement de leur fermage de 200 livres. 28 AD de la Manche, notariat de Valognes, acte du 7 novembre 1642 cote 5 E 14594. 16Et les frais liĂ©s Ă lâĂ©quipage peuvent ĂȘtre parfois bien plus lourds. Jean-Baptiste Le Prieur, fils aĂźnĂ© de maĂźtre Jean Le Prieur, sieur de Perruques, avocat Ă Valognes dĂ©cide de sâengager en juillet 1642 dans le rĂ©giment protestant de cavalerie de Courtaumer appartenant Ă la famille de Saint-Simon en Sainte-MĂšre-Ăglise. Il veut tenter lâaventure, cĂŽtoyer dans les combats et dans les camps la noblesse et peut-ĂȘtre ainsi pouvoir y accĂ©der. Il vend donc une maison Ă Valognes pour 1 300 livres, dont il ne lui reste que 300 livres aprĂšs avoir payĂ© ses dettes. Puis il achĂšte Ă crĂ©dit un cheval pour 120 livres et sans doute tout lâĂ©quipage nĂ©cessaire pour partir. Malheureusement pour lui, il est fait prisonnier Ă peine quatre mois plus tard, ayant perdu armes et chevaux ». Il revient donc Ă Valognes dĂšs le mois de novembre et vend tout ce qui lui revient de la succession de son pĂšre pour faciliter les moyens de sa remise en Ă©quipage pour le service du roi28 [âŠ] ». Puis il repart Ă la guerre. 17Pour attester de tous ces frais, les certificats de service dĂ©livrĂ©s par les commandants de compagnies ou de rĂ©giments portent souvent la mention avec armes, chevaux et equipages ». 29 Inventaire citĂ© par Claude Pithois, Brix, berceau des rois dâĂcosse, chez lâauteur, 1980, p. 167. 18LâĂ©quipage est dâailleurs la fiertĂ© et lâidentitĂ© du gentilhomme. Lâinventaire des biens de Jean Fabien, sieur de Beauval et de la Foidre prĂšs de Valognes, mort jeune Ă 35 ans en 1692 commence ainsi Et premiĂšrement, la cavale sur laquelle le deffunt sieur de la Foydre montoit, de poil alsan, avec son Ă©quipage, pistolets, bottes, esperons, Ă©pĂ©es et fuzils29 [âŠ]. » 30 ValĂ©rie Houlbert, Arbre gĂ©nĂ©alogique et notices biographiques de la maison des Montgomery, publica ... 19Les raisons de lâengagement militaire pour un gentilhomme, mis Ă part bien sĂ»r la convocation du ban et de lâarriĂšre-ban, sont multiples. On trouve tout dâabord de vĂ©ritables lignĂ©es de gentilshommes vouĂ©es Ă la guerre. Parmi les lignages les plus importants du Cotentin, sans mĂȘme parler des Matignon, on peut citer les Montgomery30, seigneurs de Ducey prĂšs dâAvranches. Gabriel II 1565-1635 est capitaine de cinquante hommes dâarmes, gouverneur de Pontorson et dâArgentan, chevalier des ordres du roi. Ses cinq fils ont tous portĂ© les armes dans lâarmĂ©e comme Jean colonel dâun rĂ©giment dâinfanterie ou Louis gĂ©nĂ©ral des troupes françaises au Danemark ou dans le brigandage comme Jacques. Il en est de mĂȘme Ă la gĂ©nĂ©ration suivante, nĂ©e vers 1650, oĂč Jean est marĂ©chal de camp des armĂ©es du roi et Louis capitaine dâune compagnie de chevau-lĂ©gers. Mais câest aussi le cas dâautres lignages plus modestes. 31 Jean Durand de Saint-Front, Les Pracomtal de Normandie », Publications multigraphiĂ©es de la Soc ... 20Robert de Pracomtal31 est lieutenant gĂ©nĂ©ral civil et criminel au bailliage dâAvranches sous Henri IV. Ses deux fils Jean et Louis entrent dans la carriĂšre des armes et sâengagent au service du duc de Longueville. Plusieurs certificats de service attestent de leur engagement lors de la guerre de Trente Ans. Louis a deux fils Pierre, qui sert dans les Gardes françaises Ă la fin des annĂ©es 1660, et François, garde du corps de Monsieur avant dâentrer au service du prince de CondĂ© dans les annĂ©es 1670, puis blessĂ© en 1681. Enfin, Louis, le fils de ce François, est lui-mĂȘme gendarme de la Garde du roi de 1694 Ă 1702. 32 Notice sur M. Gombert », Revue catholique de Normandie, 6e annĂ©e, 1896-1897, p. 499-507. 33 D. Parrott, Richelieuâs Army [âŠ], op. cit., p. 317. 21Le mĂ©tier des armes est vu comme un apprentissage nĂ©cessaire pour parfaire un honnĂȘte gentilhomme. Les carriĂšres peuvent ĂȘtre ensuite fort diverses. Charles Bauquet v. 1600-1658 sert dâabord dans les armĂ©es on le trouve au siĂšge dâArras en 1640, puis il devient prĂȘtre. De mĂȘme, Robert Gombert vers 1613-1676, originaire de lâAvranchin se destine tout dâabord Ă la prĂȘtrise sous lâinfluence de son oncle curĂ©. Son pĂšre lâenvoie alors Ă Paris pour Ă©tudier la philosophie et la thĂ©ologie. Mais lĂ , sous lâinfluence de quelques amis, il change de vie, prend les armes, devient mĂȘme une des meilleures Ă©pĂ©es de son temps et se bat plusieurs fois en duel. Finalement, Ă la mort de son oncle, il prend sa succession Ă la cure dâune paroisse en 1656 avant de fonder le sĂ©minaire dâAvranches en 1669 et de mourir en odeur de saintetĂ© en 167632. Enfin, on ne peut oublier de citer ici Charles Le Marquetel de Saint-Denis 1614-1703 plus connu sous le nom de Saint-Evremond. Dâune famille de gentilshommes, il suit des Ă©tudes de droit, puis sâengage dans la carriĂšre des armes auprĂšs du prince de CondĂ© et participe avec bravoure Ă la bataille de Rocroi et aux campagnes en Allemagne et en Flandre. Dans le mĂȘme temps, rĂ©putĂ© pour sa verve et ses crĂ©ations littĂ©raires il doit sâexiler en 1661 pour avoir critiquĂ© la politique de Mazarin. Ces gentilshommes qui effectuent quelques campagnes dans lâarmĂ©e du roi avant de quitter le mĂ©tier des armes confirment ainsi de maniĂšre symbolique leur noblesse. David Parrott dĂ©crit dâailleurs ce temps de service armĂ© comme un rite de passage, marqueur dĂ©terminant pour le statut de gentilhomme33. 34 Voir J. A. Lynn, Giant of the Grand SiĂšcle [âŠ], op. cit., chap. viii, The Culture of Command », ... 22Mais lâon sait aussi quâun certain nombre de gentilshommes entrent dans le mĂ©tier pour voir du pays, courir lâaventure, peut-ĂȘtre fuir la vie monotone au manoir ou tout simplement pour le seul dĂ©sir de la gloire ». Cette notion a dĂ©jĂ Ă©tĂ© suffisamment Ă©tudiĂ©e pour que nous nâayons pas ici le besoin dây revenir le courage est la qualitĂ© centrale du code de lâhonneur aristocratique pour accĂ©der Ă la gloire34. 35 LĂ©once de Pontaumont, Les olims de lâarrondissement de Cherbourg », MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© acadĂ© ... 23Enfin, on peut partir pour des raisons plus personnelles. Ainsi, on accompagne un ami, un parent Ă la guerre. Voire, on fuit la famille ! Philippe Le Fillastre, de Saint-Christophe-du-Foc dans la Hague naĂźt vers 1615, mais sa mĂšre meurt jeune et son pĂšre se remarie avec Gabrielle Ravalet de Tourlaville, famille au destin tourmentĂ©. HĂ©ritier principal de son pĂšre, Philippe ne peut supporter lâanimositĂ© de sa belle-mĂšre qui cherche Ă le dĂ©shĂ©riter au profit de ses enfants issus du second mariage. Il sâengage alors dans les mousquetaires du roi. Il sert dans quelques campagnes et participe au siĂšge de Lens en 1648 oĂč il est blessĂ©. Il obtient alors un congĂ© pour rentrer chez lui. Alors quâil approche de ses terres, sa belle-mĂšre ourdit un complot contre lui pour le tuer et sâen dĂ©barrasser ! PrĂ©venu Ă temps, il la dĂ©nonce et Gabrielle Ravalet prĂ©fĂšre se jeter par la fenĂȘtre de son manoir plutĂŽt que dâĂȘtre arrĂȘtĂ©e par la marĂ©chaussĂ©e35. Le gentilhomme en campagne 24Au XVIIe siĂšcle, la guerre est encore essentiellement une guerre de siĂšge. Un corps dâarmĂ©e se dĂ©place, attend du renfort, puis encercle les murailles dâune ville ou dâune forteresse en dĂ©ployant les tentes du campement. Pour les deux camps, les conditions dâhygiĂšne et de confort sont souvent dĂ©plorables, dĂ©gradĂ©es encore par le froid, la pluie, voire les Ă©pidĂ©mies ou la peste. Les assiĂ©geants creusent des tranchĂ©es, font des brĂšches dans les murailles et attaquent des bastions. Avant lâassaut final ou la capitulation de la place, il faut parfois attendre six Ă dix mois. 36 MĂ©moires de Henri de Campion, op. cit., p. 82. 25Les gens de mĂ©tier, gentilshommes ou roturiers, savent patienter plusieurs semaines pour mieux assurer leur victoire. Mais, surtout lors de la guerre de Trente Ans, le royaume aux abois en Picardie fait appel aux gentilshommes du ban et de lâarriĂšre-ban de Normandie, province limitrophe. Or ceux-ci ne voient dans la guerre que lâoccasion de faire quelque coup dâĂ©clat, de se faire remarquer du roi, mus encore par lâidĂ©al chevaleresque. Mais la dure rĂ©alitĂ© des combats est souvent bien loin de cette vision rĂȘvĂ©e. Attendre plusieurs semaines avant de lancer lâassaut leur paraĂźt bien long. Aussi, quand les gĂ©nĂ©raux virent que la noblesse se lassait de ne rien faire, dans un poste oĂč lâon ne trouvait pas de subsistances pour de lâargent, et quâun grand nombre cherchaient des prĂ©textes pour retourner chez eux, ils rĂ©solurent de se porter vers Baccarat », rapporte un gentilhomme en 163636. 26Les querelles entre gentilshommes Ă©clatent alors facilement. Dans la premiĂšre moitiĂ© du XVIIe siĂšcle, les duels sont encore assez frĂ©quents. Et sans mĂȘme parler des duels, les querelles pour des questions de prĂ©sĂ©ance sont monnaie courante. Le chevalier dâIsigny Henri de BrĂ©cey, marquis dâApilly en lâĂ©lection dâAvranches est guidon porte-Ă©tendard dans la compagnie des gendarmes du duc dâAngennes qui participe au siĂšge de Bergues en aoĂ»t 1646. Alors quâil va pour abreuver son cheval, une dispute Ă©clate entre lui et un autre gentilhomme pour avoir le seau dâeau en premier. La dispute dĂ©gĂ©nĂšre et le chevalier dâIsigny reçoit un coup de pistolet dans la cuisse gauche, quâil faut amputer. Il meurt des suites de lâopĂ©ration. 27Les campagnes militaires sont aussi lâoccasion pour les gentilshommes, du moins quand ils le peuvent, de faire montre de leur richesse. En gĂ©nĂ©ral, mĂȘme le gentilhomme possessionnĂ© dâune simple sieurie ne part pas seul, il se fait souvent accompagner dâun ou de plusieurs serviteurs. On voit ainsi Jacques Simon, sieur de Claire en lâĂ©lection de Valognes partir Ă la campagne de Lorraine en 1635 accompagnĂ© de son serviteur, Louis Couldran, pourtant Ă©cuyer lui aussi, mais surnommĂ© le muet ». Mais le train de vie de la grande noblesse est bien supĂ©rieur. Aller Ă la guerre est dâailleurs un moyen de mettre en scĂšne la puissance et donc le faste de son rang. Charles de Matignon, lieutenant-gĂ©nĂ©ral du roi en Basse-Normandie fit ainsi lors de la campagne de 1638 de grandes dĂ©penses et y mena grande noblesse ». On voit par lĂ que les deux critĂšres vont dĂ©sormais de pair. La tente dâun grand seigneur se doit dâĂȘtre luxueusement dĂ©corĂ©e et la qualitĂ© de son service de table signe sa richesse. Lors de la guerre en Flandre en 1656, le gouverneur de Valognes, Bernardin Gigault de Bellefonds, dit le marquis de Bellefonds, est lieutenant-gĂ©nĂ©ral des armĂ©es du roi grade le plus Ă©levĂ© dans lâarmĂ©e, venant juste aprĂšs les marĂ©chaux de France. Il participe au siĂšge de Valenciennes en juillet, mais lâarmĂ©e française est elle-mĂȘme attaquĂ©e par CondĂ© alors passĂ© aux Espagnols. Câest lâĂ©chec, il faut fuir rapidement et donc abandonner une partie de son Ă©quipage et de son matĂ©riel sur place. Le marquis de Bellefonds rĂ©ussit Ă traverser lâEscaut Ă la nage pendant que ses serviteurs cherchent Ă sauver ce quâils peuvent ! Bussy-Rabutin prĂ©sent au siĂšge et confident de madame de SĂ©vignĂ© lui Ă©crit dans sa lettre du 20 juillet 1656 37 Madame de SĂ©vignĂ©, Correspondance, Ă©d. Roger DuchĂȘne, Paris, 1972-1978, t. 1, p. 38-39. Vous saurez donc, Madame, que le 16e de ce mois, Ă deux heures du matin, les lignes du marĂ©chal de La FertĂ© furent attaquĂ©es par lâarmĂ©e des ennemis et forcĂ©es sans rĂ©sistance, hormis du cĂŽtĂ© des gardes françaises et de la marine, qui en firent beaucoup. [âŠ] Le marĂ©chal de La FertĂ© fut pris. [âŠ] Toute lâarmĂ©e de La FertĂ© a perdu son bagage, hormis Bellefonds, qui a sauvĂ© sa vaisselle dâargent37. » 28Enfin, des tĂ©moignages plus exceptionnels et beaucoup plus rares nous permettent de dĂ©couvrir lâactivitĂ© de quelques gentilshommes, du moins lorsque les troupes ne combattent pas. Sans gĂ©nĂ©raliser son exemple, le tĂ©moignage dâHenri de Campion est ici trĂšs prĂ©cieux. Gentilhomme normand de la rĂ©gion dâElbeuf prĂšs de Rouen, il est lieutenant dans le rĂ©giment de Normandie lors de la guerre de Trente Ans. Ce rĂ©giment dont le recrutement est encore essentiellement normand au XVIIe siĂšcle est dirigĂ© jusquâen 1635 par le sieur de Bellefonds, grand-oncle du marquis de Bellefonds. Il part en campagne avec ses livres dans sa charrette. Avec trois amis de son rĂ©giment, dont le capitaine de sa compagnie, il passe des heures Ă discuter ou Ă lire 38 MĂ©moires de Henri de Campion, op. cit., p. 106. AprĂšs avoir raisonnĂ© ensemble sur les sujets qui se prĂ©sentaient, sans dispute aigre ni envie de paraĂźtre aux dĂ©pens les uns des autres, lâun de nous lisait haut quelque bon livre, dont nous examinions les plus beaux passages, pour apprendre Ă bien vivre et Ă bien mourir, selon la morale, qui Ă©tait notre principale Ă©tude. Beaucoup prenaient plaisir Ă entendre nos confĂ©rences, qui, je crois, leur Ă©taient utiles, puisquâil ne sây disait rien qui ne portĂąt Ă la vertu. Je nâai point trouvĂ© depuis de sociĂ©tĂ© si commode ni si raisonnable elle dura les sept annĂ©es que je servis dans le rĂ©giment de Normandie38. » 29Ailleurs dans ses mĂ©moires, on apprend quels sont ces auteurs de rĂ©fĂ©rence auprĂšs des gentilshommes Plutarque, pour apprendre Ă bien vivre, Montaigne pour apprendre Ă bien se connaĂźtre et SĂ©nĂšque pour apprendre Ă bien mourir. Le fait dâarmes 30La guerre, pour le gentilhomme du XVIIe siĂšcle, est lâoccasion de montrer sa bravoure, voire son hĂ©roĂŻsme. Lâesprit chevaleresque est encore bien ancrĂ© dans la noblesse. Mais la mort peut se trouver au bout de lâĂ©pĂ©e, ou alors câest la blessure qui, si elle est grave, peut Ă©carter dĂ©finitivement le gentilhomme du champ de bataille. Olivier Morel, sieur de Saint-Cyr, prĂšs de Valognes, participe Ă de nombreuses campagnes dans les annĂ©es 1620 et entre autres au siĂšge de La Rochelle en 1628. Puis il est plusieurs fois blessĂ© et doit se retirer Ă Valognes oĂč il devient receveur des tailles. 39 Voir lâarticle dâHervĂ© DrĂ©villon, Publier nos playes et valeurs. Le fait dâarmes et sa notoriĂ©tĂ© ... 40 J. A. Lynn, Giant of the Grand SiĂšcle [âŠ], op. cit., p. 251. 31Le fait dâarmes victorieux peut donc servir de faire-valoir pour le gentilhomme qui recherche les honneurs et les faveurs du roi39. Comme lâĂ©crit justement John Lynn Dans cette culture [nobiliaire] lâapparence comptait plus que le fait dâarmes, et donc il ne suffisait pas dâĂȘtre brave, encore fallait-il ĂȘtre vu et reconnu comme tel par ses pairs40. » Câest le cas particuliĂšrement flagrant du marquis de Bellefonds, mĂȘme si son exemple reste exceptionnel parmi les gentilshommes du Cotentin. DĂ©jĂ en 1654 lors de la tentative de dĂ©barquement des troupes françaises dans la baie de Naples, Bellefonds se distingue en sautant le premier de son vaisseau Ă la mer, puis en chargeant seul les premiers cavaliers sur le rivage. Une douzaine dâannĂ©es plus tard Ă©clate la guerre de DĂ©volution 1667-1668. Louis XIV rĂ©clame au nom de sa femme Marie-ThĂ©rĂšse, fille du dĂ©funt roi dâEspagne Philippe IV, des villes et des territoires dans les Pays-Bas espagnols. LâEspagne refuse et la guerre dĂ©bute au printemps 1667. Bellefonds y est lieutenant-gĂ©nĂ©ral et sây fait remarquer lors de la prise de Lille en aoĂ»t. Louis XIV le nomme alors gouverneur de cette nouvelle place forte du nord du royaume, mais le marquis refuse, prĂ©fĂ©rant rester prĂšs du roi sur le champ de bataille ! Câest Charles de Batz, plus connu sous le nom de dâArtagnan qui est nommĂ© Ă sa place. Louis XIV confie alors Ă Bellefonds le commandement de toutes les troupes dâavant-garde, entre Sambre et Meuse. Câest en se rendant Ă son nouveau poste en octobre 1667 que le marquis dĂ©fait la garnison de Mons, bien que ses troupes soient infĂ©rieures en nombre. Louis XIV rapporte mĂȘme le fait dâarmes dans son journal 41 Charles Dreyss, MĂ©moires de Louis XIV, pour lâinstruction du dauphin, Paris, Didier, 1860, vol. 1, ... Bellefonds, dĂ©tachĂ© de tous les autres, veillait sur les places qui Ă©taient entre la Sambre et la Meuse, oĂč il fit, dĂšs son arrivĂ©e, une action trĂšs-remarquable, ayant avec huit cents chevaux dĂ©fait quinze cents hommes des ennemis, qui avaient infanterie et cavalerie, et Ă©taient Ă©paulĂ©s dâun bois41. » 42 Nous avons pu en retrouver un exemplaire Ă la bibliothĂšque municipale de Toulouse, Fonds ancien, c ... 43 SHD, A1 222, lettre du 14 juin 1668 citĂ©e par Camille Rousset, Histoire de Louvois et de son admin ... 32AprĂšs les quartiers dâhiver, la campagne reprend au printemps suivant et Bellefonds, de son propre chef prend lâoffensive et sâempare, aprĂšs cinq jours de siĂšge, de la place forte de Genappe au sud de Bruxelles le 14 mars. Ce nâest certes pas une grande victoire militaire, mais le marquis va sâattacher Ă la rendre glorieuse. La Gazette de France du 24 mars 1668 publie, sur 3 pages, la relation de La prise de Gennap, et de Benne-Laleu, par le Marquis de Bellefonds, Lieutenant gĂ©nĂ©ral des ArmĂ©es du Roy en Flandres ». Le marquis y est bien sĂ»r campĂ© dans le rĂŽle de lâacteur principal. AprĂšs avoir pris la petite forteresse voisine de Braine lâAlleud, il fait le siĂšge de Genappe jusquâĂ la capitulation et la capture des prisonniers, dont des officiers et le gouverneur. LâarmĂ©e de Bellefonds, quant Ă elle, dĂ©plore quelques tuĂ©s et blessĂ©s dont Bellefonds lui-mĂȘme blessĂ© pĂ©rilleusement dâun coup de fauconneau qui luy a cassĂ© le bras gauche au dessous de lâespaule ». Dans cette relation du fait dâarmes, Bellefonds nâoublie pas de faire mentionner quelques-uns de ses proches qui servent avec lui on apprend ainsi que le sieur de Bouteville, frĂšre du marquis de SĂšbeville mestre de camp dâun rĂ©giment de cavalerie allemand, se signala Ă la tĂȘte de 40 dragons [âŠ] ». Il sâagit de son cousin germain Henri-Robert, de la famille des Cadot, seigneurs de SĂ©beville dans les marais du Cotentin. Pour assurer la diffusion de son fait dâarmes, le marquis de Bellefonds fait mĂȘme imprimer Ă ses frais un feuillet reprenant tout le texte de la Gazette42. Certes cet exploit tombe bien mal, car Louis XIV avait conclu fin 1667 une trĂȘve des combats jusquâĂ la fin du mois de mars ! Quâimporte. AprĂšs ce fait dâarmes, le marquis de Bellefonds ne cache plus son ambition dâĂȘtre nommĂ© marĂ©chal de France. Une lettre du 14 juin 1668 du secrĂ©taire dâĂtat Ă la Guerre, Le Tellier, Ă son fils, Louvois, le confirme Le roi nous a dit que M. de Bellefonds a encore pressĂ© sa promotion, essayant de lui faire marquer le jour quâelle se feroit, Ă quoi le roi a dit quâil nâa pas voulu entendre43 [âŠ]. » Et câest finalement le 8 juillet 1668 que le roi crĂ©e trois nouveaux marĂ©chaux de France, dont Bellefonds, qui est ainsi parvenu Ă ses fins. Ses lettres de provision de marĂ©chal de France reprennent, sur plusieurs pages, toute sa carriĂšre militaire, depuis le siĂšge de Valognes en 1649 qui le distingua aux yeux du roi jusquâĂ la campagne de 1667-1668, en passant par celles de Champagne, de Catalogne, de Guyenne, de Naples et dâItalie du Nord, sans omettre ses ambassades extraordinaires Ă Madrid et en Hollande. Servir Ă lâĂ©tranger 44 Michel VergĂ©-Franceschi Ă©d., Mes campagnes de mer sous Louis XIV par Philippe de Villette-Mursay ... 45 Ibid., p. 419. 33Tous les gentilshommes ne servent pas forcĂ©ment aux frontiĂšres du royaume. Nous ne ferons tout dâabord ici quâĂ©voquer briĂšvement ceux qui servent dans la Royale. Bien sĂ»r le plus cĂ©lĂšbre est lâamiral de Tourville dont le pĂšre CĂ©sar de Costentin, est capitaine dâune compagnie de chevau-lĂ©gers dans le rĂ©giment du cardinal de Richelieu. Ă 19 ans, Anne-Hilarion combat dĂ©jĂ en MĂ©diterranĂ©e orientale contre les Turcs. En 1682 Ă 40 ans, il est lieutenant gĂ©nĂ©ral des armĂ©es navales, puis vice-amiral en 1689 et marĂ©chal en 1693. Il faut citer aussi le marquis dâAmfreville vers 1640-1692 lieutenant gĂ©nĂ©ral en 1688, le comte de La Luzerne, chef dâescadre en 1715 il deviendra vice-amiral en 1741 et les nombreux commandants de vaisseaux le chevalier dâAmfreville et les trois frĂšres Cadot de SĂ©beville dont un devient mĂȘme chef dâescadre. Leurs Ă©tats de service ont Ă©tĂ© donnĂ©s par M. VergĂ©-Franceschi dans le dictionnaire qui accompagne lâĂ©dition des mĂ©moires de Philippe de Villette-Mursay44. Et, comme il le note fort justement, les Davy dâAmfreville et les Cadot de SĂ©beville illustrent la puissance militaire du clan du marĂ©chal de Bellefonds45 ». 34Il est Ă remarquer quâun grand nombre de ces officiers de marine ont Ă©tĂ© admis dans lâordre de Malte, mĂȘme si le marquis dâAmfreville doit le quitter pour pouvoir Ă©pouser la fille du marĂ©chal de Bellefonds. Il y aurait lĂ dâailleurs quelques pistes de recherches. 46 Ferenc Toth, Saint-Gotthard, 1664. Une bataille europĂ©enne, Paris, Ăd. Lavauzelle, 2007. 35Une autre grande affaire qui amena plusieurs gentilshommes du Cotentin loin de leurs terres est la bataille de Saint-Gothard en 1664 en Hongrie. Louis XIV accorde un secours de 6 000 hommes Ă lâempereur LĂ©opold pour lutter contre les troupes ottomanes qui menacent dangereusement lâEmpire. Il sâagit de cinq rĂ©giments dâinfanterie, de quarante compagnies de cavalerie et de cent vingt gentilshommes volontaires, sous le commandement du comte de Coligny. Et câest en partie grĂące Ă eux que les Turcs vont ĂȘtre mis en dĂ©route46. Parmi les gentilshommes du Cotentin, on peut citer le comte de GacĂ©, le marquis de SĂ©beville et le seigneur de Flottemanville. Le comte de GacĂ© est Charles de Matignon 1641-1674, petit-fils du lieutenant gĂ©nĂ©ral de Basse-Normandie. Bernardin Cadot 1641-1711, marquis de SĂ©beville va revenir aprĂšs la bataille auprĂšs de lâempereur de 1681 Ă 1684 comme ambassadeur extraordinaire du roi de France. Il lui sauvera mĂȘme la vie lors du siĂšge de Vienne par les Turcs en 1683. ThĂ©odose-Trajan du Moncel vers 1634-1710, seigneur de Flottemanville est issu dâune vieille famille de militaires. Capitaine de cavalerie, il est fait chevalier du Saint-Empire par lâempereur LĂ©opold Ă la suite de la bataille de Saint-Gothard, distinction trĂšs rarement accordĂ©e Ă un Ă©tranger. Il peut alors rajouter Ă ses armoiries de gueules Ă trois losanges dâargent une croix de Hongrie dâor, plantĂ©e sur une montagne Ă trois coupeaux de sinople et une couronne dâor au pied de la croix ». Il Ă©pouse en 1675 une des sĆurs de Cadot de SĂ©beville. 36Une autre catĂ©gorie bien particuliĂšre de gentilshommes du Cotentin qui servent Ă lâĂ©tranger est constituĂ©e des huguenots. JusquâĂ la guerre de Trente Ans, il existe encore des rĂ©giments français clairement identifiĂ©s comme protestants. Câest le cas dâau moins deux rĂ©giments formĂ©s de gentilshommes huguenots du Cotentin le rĂ©giment de cavalerie de Courtaumer et celui de Montgomery. Jean-Antoine de Saint-Simon, de Sainte-MĂšre-Ăglise, devenu marquis de Courtaumer en 1620, est autorisĂ© Ă lever un rĂ©giment Ă son nom en 1629 pour aller servir en Hollande protestante. Câest au cours du siĂšge de Bois-le-Duc restĂ©e fidĂšle au roi dâEspagne quâil trouve la mort en septembre 1629. Mais son rĂ©giment continue Ă servir lĂ -bas. Les Montgomery, comtes de Ducey, sont eux les plus puissants seigneurs protestants de la rĂ©gion dâAvranches. Plusieurs dâentre eux sâen vont combattre aux cĂŽtĂ©s de princes Ă©trangers protestants, mais alliĂ©s du royaume de France. Louis de Montgomery est ainsi gĂ©nĂ©ral des troupes françaises au Danemark en 1627. Ces troupes sont dâailleurs composĂ©es pour lâessentiel de gentilshommes normands. Jean, seigneur du Breuil, frĂšre cadet de Louis en fait aussi partie. Câest grĂące Ă lâintervention des SuĂ©dois et de Montgomery que le roi Christian IV de Danemark peut Ă©viter lâinvasion de son pays par les troupes impĂ©riales et signer la paix de LĂŒbeck en 1629. Ces gentilshommes ne vont pas rentrer chez eux et vont aller servir des princes allemands et le roi de SuĂšde, Gustave-Adolphe, toujours contre lâEmpire. Lâengagement religieux des Montgomery est nettement affirmĂ©, voire provocateur. Jean, seigneur du Breuil, va jusquâĂ faire boire son cheval dans le bĂ©nitier de la cathĂ©drale dâAvranches en 1649 ! Dans la seconde moitiĂ© du XVIIe siĂšcle, les promotions militaires des huguenots sont dĂ©sormais plus rarement accordĂ©es. Certains dĂ©cident donc de partir dĂ©finitivement Ă lâĂ©tranger. Câest le cas aussi Ă©videmment des protestants restĂ©s fidĂšles Ă leur foi aprĂšs la rĂ©vocation de lâĂ©dit de Nantes. Ainsi, Jacques Richier, sieur de Cerisy et de Cambernon, se rĂ©fugie en Hollande et suit le prince dâOrange en Angleterre avec le grade de lieutenant dans une compagnie de rĂ©fugiĂ©s protestants français. 37LĂ encore, il y aurait quelques pistes de recherches Ă explorer. Car si la plupart des Ă©tudes sur lâarmĂ©e au XVIIe siĂšcle contiennent des chapitres sur les rĂ©giments et les soldats Ă©trangers servant pour le roi de France, bien peu se sont intĂ©ressĂ©s au rĂŽle des gens dâarmes du royaume servant Ă lâĂ©tranger. ClientĂšle et parentĂšle 47 Madeleine Foisil, La parentĂšle et la clientĂšle du duc de Longueville », Yves Durand dir., Homm ... 38Partir Ă la guerre, que ce soit volontairement ou lors de la levĂ©e du ban, est souvent synonyme de fidĂ©litĂ© de type fĂ©odal ou lignager. On peut ainsi, dans certains cas, reconstituer la pyramide fĂ©odale de certaines rĂ©gions du Cotentin. Madeleine Foisil lâa dĂ©jĂ analysĂ©e finement Ă lâĂ©chelle de la province de la Normandie47. 48 Archives nationales, Archives du Palais de Monaco, J 46, microfilmĂ© en 590 Mi 322. 39Lorsque la monarchie française entre dans la guerre de Trente Ans, Charles de Matignon, comte de Thorigny, lieutenant gĂ©nĂ©ral du roi en Basse-Normandie, capitaine de cent hommes dâarmes » passe en revue ses troupes Ă Rotz prĂšs de Caen au printemps 1635. Elles sont en fait composĂ©es de deux compagnies de gentilshommes Ă cheval, dont celle de La LuthumiĂšre. Nous avons pu en retrouver lâeffectif complet aux Archives nationales48. Charles de Matignon, lieutenant gĂ©nĂ©ral, est parent dâHenri dâOrlĂ©ans, duc de Longueville et gouverneur de Normandie par sa femme ĂlĂ©onore dâOrlĂ©ans, tante du gouverneur. Cette alliance prestigieuse lui permet dâailleurs de cousiner avec le roi. La compagnie de La LuthumiĂšre est celle de François de La LuthumiĂšre 1579-1658, baron de La LuthumiĂšre et de Brix, prĂšs de Valognes. Il est aussi gouverneur de Cherbourg et capitaine de la compagnie des gendarmes de M. de Matignon. Sa fille Ă©pousera quelques annĂ©es plus tard, en 1648 Henri de Matignon, petit-fils du lieutenant gĂ©nĂ©ral. On trouve aussi dans la mĂȘme compagnie Jean de La LuthumiĂšre, sieur dâYvetot, frĂšre cadet du capitaine. Et, parmi les maĂźtres, nom donnĂ© aux cavaliers de lâĂ©poque, on relĂšve plusieurs liens de parentĂ©. Par exemple, Jacques dâAuxais, sieur du Breuil, qui est lâĂ©poux dâAvoye, la propre sĆur du capitaine de La LuthumiĂšre. 49 EugĂšne de Beaurepaire, Thomas Leroy et le manuscrit des Curieuses recherches [du Mont-Saint-Mich ... 40La fidĂ©litĂ© et les bons et loyaux services peuvent ensuite ĂȘtre rĂ©compensĂ©s par lâattribution de charges. En 1639, Jacques Le Hoult, sieur de la GuillonniĂšre, est nommĂ© lieutenant du gouverneur du Mont-Saint-Michel par Henri de Bricqueville, marquis de La Luzerne. Pour justifier cette nomination, le gouverneur du Mont-Saint-Michel se dit asseurĂ© de la fidĂ©litĂ© dudit Le Hoult et de lâaffection en son endroit pour lâavoir expĂ©rimentĂ© en la cavallerie, du corps de laquelle il avoit longtemps estĂ© soubs la cornette dudit seigneur marquis49 ». 41Avec lâamiral de Tourville, lâhomme Ă la carriĂšre militaire la plus brillante est le marquis de Bellefonds. PossessionnĂ©e dans les marais de Carentan, sa famille est alliĂ©e avec plusieurs puissantes maisons du nord Cotentin. Lors de la guerre de DĂ©volution 1667-1668, lâaide de camp de Bellefonds est le marquis de Villars. Pierre marquis de Villars 1623-1698, pĂšre du futur marĂ©chal de Villars, a Ă©pousĂ© la tante du marquis de Bellefonds en 1651 et sert donc son puissant neveu. Dans les troupes commandĂ©es par le lieutenant gĂ©nĂ©ral, on trouve aussi Bernardin Cadot, marquis de SĂ©beville. Bernardin est le fils aĂźnĂ© de François, sieur de SĂ©beville sa terre ne sera Ă©rigĂ©e en marquisat quâen 1680 grĂące aux brillants Ă©tats de service de ses fils et de Françoise Gigault de Bellefonds, autre tante du marquis. AgĂ© de 26 ans seulement, Bernardin Cadot est lieutenant-colonel dâun rĂ©giment de cavalerie allemand. Son jeune frĂšre, on lâa vu, le sieur de Boutteville, est personnellement citĂ© lors de la prise de Genappe par Bellefonds. Quelques annĂ©es plus tard, en 1674, le marĂ©chal de Bellefonds choisit comme aide de camp Bon-Thomas Castel marquis de Saint-Pierre. Câest le frĂšre de lâabbĂ© de Saint-Pierre de Saint-Pierre-Ăglise dans le nord-est du Cotentin et le fils de Charles marquis de Saint-Pierre et de Madeleine Gigault de Bellefonds, tante du marĂ©chal. 50 MĂ©moires de Henri de Campion, op. cit., p. 67-68. 42La guerre peut donc ĂȘtre un moyen pour les gentilshommes de renforcer leurs liens de famille et la solidaritĂ© lignagĂšre. Claude de Pilliers est le cousin germain de la mĂšre dâHenri de Campion, gentilhomme normand dĂ©jĂ citĂ© qui nous a laissĂ© ses mĂ©moires. Ce cousin est premier capitaine du rĂ©giment de Normandie, mais il perd Ă la guerre en 1635 son fils aĂźnĂ© qui Ă©tait lieutenant dans sa compagnie. Le roi lui accorde alors en rĂ©compense » une charge dâenseigne correspondant au grade de sous-lieutenant actuel avec permission de la vendre. Une telle charge vaut Ă lâĂ©poque quatre mille livres, somme Ă©levĂ©e, mais il sâagit du rĂ©giment de Normandie, un des six vieux » de lâinfanterie et donc un des plus rĂ©putĂ©s. Claude de Pilliers la propose alors Ă son jeune petit cousin Henri de Campion pour seulement 2 250 livres par rapport Ă notre parentĂ© » Ă©crit le mĂ©morialiste, qui rajoute Et comme les vieux rĂ©giments, tels que celui dont je parle, Ă©toient en une haute rĂ©putation, et regardĂ©s comme la vĂ©ritable Ă©cole de la guerre et le chemin le plus apparent de la fortune militaire, je nâhĂ©sitai pas de profiter de la bonne volontĂ© de mon parent, me voyant sans appui50. » Lâanoblissement pour services militaires 51 GĂ©rard dâArundel de CondĂ©, Dictionnaire des anoblis normands 1600-1790, Rouen, chez lâauteur, 19 ... 52 En rappelant que toutes ces donnĂ©es ne sont pas exemptes dâapproximations, car lâidentification de ... 43Dans quelle mesure lâanoblissement est-il octroyĂ© pour services militaires ? La rĂ©ponse nâest pas simple. Essentiellement parce que les anoblissements peuvent lâĂȘtre pour lâexercice dâune charge et pour plusieurs annĂ©es passĂ©es dans les armĂ©es du roi. Dâautre part, un roturier peut avoir servi dans une compagnie et acheter par ailleurs son anoblissement. Essayons tout de mĂȘme de donner un ordre de grandeur. Pour cela, nous avons dĂ©pouillĂ© le Dictionnaire des anoblis normands 1600-1790 publiĂ© par GĂ©rard dâArundel de CondĂ©51. Il sâagit dâune recension des actes dâanoblissements enregistrĂ©s par la Chambre des aides de Normandie. De 1610 Ă 1715, on compte 182 actes concernant le Cotentin, soit 20 % des actes pour toute la Normandie sur la mĂȘme pĂ©riode. Sur ces 182 actes, 146 sont des premiers anoblissements. De ceux-lĂ , 47 % sont des anoblissements pour charges ou par achat, donc prĂšs de la moitiĂ©. Des anoblissements contre finances furent, en effet, octroyĂ©s par le roi pour tout le royaume par lâĂ©dit de 1609 pour un coĂ»t de 1 600 livres, par celui de 1636 et surtout par ceux de 1697 500 anoblissements et de 1702 200 anoblissements. Les actes qui comprennent mention de services militaires, quâils soient ou non accompagnĂ©s de lâexercice dâune charge de judicature ou que ce soit Ă lâoccasion dâun achat dâanoblissement, sâĂ©lĂšvent Ă 44 % du total, soit juste un peu moins que ceux octroyĂ©s pour le seul exercice dâun office. Ă ces 91 % sâajoutent 9 % dâactes avec la seule mention pour services » qui ne permet guĂšre dâen savoir plus⊠Les 36 actes restants sont donc des confirmations dâanoblissements52. 53 Michel Le Pesant, ArrĂȘts du Conseil du Roi. RĂšgne de Louis XIV. Inventaire analytique des arrĂȘts e ... 54 GĂ©rard dâArundel de CondĂ©, id., voir lâintroduction. 44En effet, lâanoblissement nâest jamais dĂ©finitif au XVIIe siĂšcle. Et Louis XIV est le roi qui, plus que les autres, a exercĂ© une forte pression fiscale sur les anoblis. DĂ©jĂ en 1646, un arrĂȘt du conseil du roi ordonne que dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, tous les anoblis depuis 1594 sauf ceux qui lâont Ă©tĂ© pour services militaires seront compris dans les rĂŽles de distribution des rentes53 ». Sans parler de la grande recherche de noblesse de 1665-1666, dite de Chamillart pour la Normandie et destinĂ©e Ă faire condamner tous ceux qui, depuis 1606, ont usurpĂ© la qualitĂ© dâĂ©cuyers, lâĂ©dit royal de 1664 rĂ©voque tous les anoblissements accordĂ©s depuis 161454 ! Les tracas sont donc nombreux pour beaucoup de nouveaux gentilshommes qui doivent alors reprĂ©senter leurs preuves dâanoblissement et les certificats qui peuvent le justifier. Sâils sont confirmĂ©s dans leur anoblissement, ils doivent alors payer une taxe de maintenue ! Et presque toujours, un anobli confirmĂ© aprĂšs sa rĂ©vocation de 1664 lâest pour services militaires dans les armĂ©es du roi. Nicolas dâOrange, sieur des Roches, de Cherbourg, lieutenant dâune compagnie de chevau-lĂ©gers est anobli en mars 1653 pour services militaires. Il est rĂ©voquĂ© en 1664, mais il continue nĂ©anmoins Ă servir. Il lui faut attendre fĂ©vrier 1679 pour quelles raisons ? pour se voir confirmĂ© dans son anoblissement. Et pourtant sa carriĂšre militaire ne manque pas de panache lieutenant gĂ©nĂ©ral des armĂ©es du roi, marĂ©chal gĂ©nĂ©ral des logis de la cavalerie lĂ©gĂšre, gouverneur de FougĂšres aux portes de la Bretagne 1681, gouverneur des Invalides 1696, brigadier des armĂ©es du roi, chevalier de Saint-Louis 1694, pour cinquante annĂ©es de services puis commandeur dans le mĂȘme ordre. Il est inhumĂ© en 1705 dans le caveau des gouverneurs des Invalides. 55 RĂ©my Villand, Analyse des papiers Le Gardeur de Croisilles et Le Louey conservĂ©s Ă Brillevast »,... 45Le service armĂ© peut aussi sauver de la dĂ©rogeance un gentilhomme nĂ©cessiteux. Les Le Louey, sieurs de Beauchamps, de la vicomtĂ© de Valognes, ont achetĂ© leur noblesse en 1543. Mais Guillaume Le Louey dĂ©cĂ©dĂ© vers 1610 et son fils Thomas dĂ©cĂ©dĂ© vers 1655 en sont tous deux rĂ©duits Ă exercer lâoffice de greffier en lâĂ©lection de Valognes pour survivre. Or cet office est dĂ©rogeant ! Aussi ne figurent-ils pas dans le rĂŽle de la noblesse de Cotentin de 1640. HervĂ©, sieur du Ronceray, fils de Thomas, devient, lui, conseiller en la mĂȘme Ă©lection. Il est sur le point dâĂ©pouser Françoise de Mons en 1646, lorsque sa future belle-famille semble lui faire quelques difficultĂ©s sur ses quartiers de noblesse. Il engage donc les procĂ©dures et se voit confirmĂ© dans sa noblesse en fĂ©vrier 1646 par lettres patentes, enregistrĂ©es Ă la cour des aides de Normandie en dĂ©cembre 1648. Et comme justification, ces lettres de confirmation de noblesse portent que son grand-pĂšre Guillaume venant Ă sâapercevoir quâon luy pourroit objecter derogeance Ă sa qualitĂ© noble, Ă cause dudit exercice desdits greffes, il lâavoit quittĂ© et repris Ă lâexemple de ses prĂ©dĂ©cesseurs lâexercice des armes, et avoit rendu ses services au Roy nostre trĂšs honorĂ© seigneur et pĂšre, prĂšz de la personne de nostre trĂšs cher cousin le prince de CondĂ©55 ». En octobre 1646 HervĂ© Le Louey peut enfin Ă©pouser la demoiselle de Mons. 46Et mĂȘme jusquâau milieu du XVIIIe siĂšcle les vexations contre les nouveaux gentilshommes continuent, eux qui ont pourtant bien souvent dĂ©jĂ dĂ©pensĂ© de fortes sommes pour ĂȘtre anoblis et qui ont servi dans les armĂ©es du roi. LâĂ©dit de septembre 1754 rĂ©voque ainsi tous les anoblissements depuis 1634 sauf Ă titre militaire ! Il faut donc de nouveau prĂ©senter ses piĂšces justificatives. Câest le cas de la famille Morel, dĂ©jĂ citĂ©e. Charles Morel de la Roguerie, le suppliant, rĂ©sume bien Ă lui seul le regard des gentilshommes sur le service du roi » 56 Remy Villand, Inventaire du chartrier de la famille de Morel », Publications multigraphiĂ©es de ... [Il] ose dire, avec confiance, quâil est peu de famille dont les services militaires et dans la magistrature soient multipliĂ©s et distinguĂ©s depuis plus de deux siĂšcles. Parmi les auteurs et collatĂ©raux de son nom, descendants dâAndrĂ© Morel, son troisiĂšme aĂŻeul, il sâen trouve plus de douze qui ont portĂ© les armes au service de Sa MajestĂ©, soit en qualitĂ© de capitaines ou de lieutenants de cavalerie, de dragons et dâinfanterie, places quâils paraissent sâĂȘtre disputĂ©s Ă lâenvie les uns et les autres de remplir avec la plus grande distinction. Lorsque leurs blessures ou infirmitĂ©s naturelles ne leur ont pas permis de continuer leurs services, ils nâont pas Ă©tĂ© moins jaloux de remplir des charges dans la magistrature56 [âŠ]. » 47Parmi les certificats de service qui justifient cette requĂȘte, on trouve ceux dâAdrien, chevalier de Saint-Louis et de Saint-Michel, de ThĂ©odore-AndrĂ©, dĂ©cĂ©dĂ© capitaine de dragons, du sieur Morel de Favencourt dĂ©cĂ©dĂ© lieutenant au rĂ©giment de Bourg-cavalerie en 1686, et des certificats de prĂ©sence au ban et Ă lâarriĂšre-ban du grand bailliage de Cotentin. En considĂ©ration de ces services, lâacte de confirmation de noblesse des Morel est tout de mĂȘme signĂ© en 1758. * 57 En 1700 encore, lâintendant de Caen Foucault Ă©crit, Ă propos de lâĂ©lection de Carentan quâ il nây ... 48Au terme de cette Ă©tude, que peut-on retenir sur ces gentilshommes du Cotentin servant dans les armĂ©es au milieu du XVIIe siĂšcle ? DĂšs la fin des annĂ©es 1630, les levĂ©es du ban et de lâarriĂšre-ban sont jugĂ©es inutiles, voire nuisibles pour la monarchie française entrĂ©e en guerre. DĂšs lors, les gentilshommes vont devoir sâengager pour partir servir le roi. Ceux qui peuvent soutenir cet effort financier sont estimĂ©s Ă 25 % du nombre total de gentilshommes du Cotentin dans la dĂ©cennie qui suit. Aussi, dans la deuxiĂšme moitiĂ© du XVIIe siĂšcle, cette rĂ©gion va-t-elle fournir un nombre assez important dâofficiers gĂ©nĂ©raux57 engageant dans leurs rĂ©giments des gentilshommes moins fortunĂ©s du Cotentin, voire de jeunes roturiers. Certains de ces derniers, aprĂšs plusieurs annĂ©es de service, moyennant finance et, ayant surmontĂ© les obstacles liĂ©s Ă des Ă©dits dâanoblissements plusieurs fois annulĂ©s, peuvent enfin accĂ©der au rang de gentilshommes. Notes 1 Voir la synthĂšse de Jean Chagniot, Guerre et sociĂ©tĂ© Ă lâĂ©poque moderne, Paris, PUF, 2001, au chap. XI qui prĂ©sente lâhistorique et la critique de ce concept. 2 John. A. Lynn, Giant of the Grand SiĂšcle. The French Army, 1610-1715, Cambridge, Cambridge University Press, 1997. 3 David Parrott, Richelieuâs Army. War, Government and Society in France, 1624-1642, Cambridge, Cambridge University Press, 2001. 4 Guy Rowlands, The Dynastic State and the Army under Louis XIV. Royal Service and Private Interest, 1661-1701, Cambridge, Cambridge University Press, 2002. 5 On peut citer les ouvrages de Jean-Marie Constant, La noblesse française aux XVIe et XVIIe siĂšcles, Paris, Hachette, 1994 et de Laurent Bourquin, La noblesse dans la France moderne XVIe-XVIIIe siĂšcles, Paris, Belin, 2002. 6 James B. Wood, The Nobility of The Ălection of Bayeux 1463-1666. Continuity through Change, Princeton, Princeton University Press, 1980. 7 On peut citer les articles dâAndrĂ© Corvisier, La noblesse militaire aspects militaires de la noblesse française du XVIe au XVIIIe siĂšcle », Histoire sociale â Social History, t. 11, no 22, 1978, p. 336-355 et de Laurent Bourquin, Les carriĂšres militaires de la noblesse au XVIIe siĂšcle reprĂ©sentations et engagements », Josette Pontet, Michel Figeac et Marie Boisson Ă©d., La noblesse de la fin du XVIe au dĂ©but du XXe siĂšcle, un modĂšle social ?, Biarritz, Atlantica, 2002, t. 1, p. 271-288. 8 AndrĂ© Corvisier, Les contrĂŽles de troupes de lâAncien RĂ©gime, Vincennes, ministĂšre de la DĂ©fense, Service historique des armĂ©es, 1968-1970, 4 vol. 9 HervĂ© DrĂ©villon, LâimpĂŽt du sang. Le mĂ©tier des armes sous Louis XIV, Paris, Tallandier, 2005, dont le chapitre vii p. 273-315. 10 D. Parrott, Richelieuâs Army [âŠ], op. cit., p. 63. 11 Gustave Dupont, Histoire du Cotentin et de ses Ăźles, Caen, Le Blanc-Hardel, 1870-1885, t. 4, p. 78. Lâauteur nâindique pas sa source. 12 AD du Calvados, Fonds Petitville, 1 F 352 1635. 13 JoĂ«l Cornette, Les annĂ©es cardinales. Chronique de la France, 1599-1652, Paris, Sedes, 2000, p. 275. 14 D. Parrott, Richelieuâs Army [âŠ], op. cit., p. 63. 15 MĂ©moires de Henri de Campion, Marc Fumaroli Ă©d., Paris, Mercure de France, 1990, p. 81. 16 Charly Guilmard, MĂ©moire gĂ©nĂ©alogique sur la maison de Billeheust, Valognes, chez lâauteur, 2007, p. 125. 17 Service historique de la DĂ©fense dorĂ©navant notĂ© SHD A1 30, fo 337, 27 novembre 1636. Lettre citĂ©e par D. Parrott, ibid., p. 64. 18 PubliĂ©e partiellement par RenĂ© de BrĂ©bisson, Ătats des nobles et des anoblis dans les neuf Ă©lections de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, 1598-1599 », Revue catholique de Normandie, t. 24, 1915 p. 423-428. 19 GĂ©rard Mauduech, Recherche de noblesse de dâAligre 1634, publication multigraphiĂ©e, archives dĂ©partementales de la Manche, s. d. 20 Copie manuscrite des deux rĂŽles consultable aux AD de la Manche, 1 Mi 395, R 10, fo 31-45. 21 Hippolyte Sauvage, La recherche de Paris intendant de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, 1624 », Notices, mĂ©moires et documents de la SociĂ©tĂ© dâarchĂ©ologie et dâhistoire de la Manche, t. 29, 1911, p. 31-58 et t. 30, 1912, p. 29-59. 22 Ce rĂŽle a Ă©tĂ© publiĂ© dans les Notices, mĂ©moires et documents, t. 11, 1893, p. 2-89. 23 J. B. Wood, The Nobility of the Election of Bayeux [âŠ], op. cit., p. 77-78. 24 L. Bourquin, Les carriĂšres militaires de la noblesse au XVIIe siĂšcle reprĂ©sentations et engagements », La noblesse de la fin du XVIe siĂšcle au dĂ©but du XXe siĂšcle [âŠ], op. cit., p. 280. 25 J. A. Lynn, Giant of the Grand SiĂšcle [âŠ], op. cit., p. 369. 26 L. Bourquin, art. citĂ©, p. 273-277. 27 Inventaire du chartrier Simon du Buisson », Publications multigraphiĂ©es de la SociĂ©tĂ© dâarchĂ©ologie et dâhistoire de la Manche, fasc. 27, Saint-LĂŽ, 1975, p. 22. 28 AD de la Manche, notariat de Valognes, acte du 7 novembre 1642 cote 5 E 14594. 29 Inventaire citĂ© par Claude Pithois, Brix, berceau des rois dâĂcosse, chez lâauteur, 1980, p. 167. 30 ValĂ©rie Houlbert, Arbre gĂ©nĂ©alogique et notices biographiques de la maison des Montgomery, publication multigraphiĂ©e publiĂ©e grĂące au programme Leader II de lâAvranchin, 1998, 2 vol. 31 Jean Durand de Saint-Front, Les Pracomtal de Normandie », Publications multigraphiĂ©es de la SociĂ©tĂ© dâarchĂ©ologie et dâhistoire de la Manche, fasc. 31, 1978. 32 Notice sur M. Gombert », Revue catholique de Normandie, 6e annĂ©e, 1896-1897, p. 499-507. 33 D. Parrott, Richelieuâs Army [âŠ], op. cit., p. 317. 34 Voir J. A. Lynn, Giant of the Grand SiĂšcle [âŠ], op. cit., chap. viii, The Culture of Command », p. 248 sq., ainsi que les ouvrages faisant le lien entre lâidĂ©e de race et lâhonneur chez les gentilshommes Arlette Jouanna, LâidĂ©e de race en France au XVIe siĂšcle et au dĂ©but du XVIIe siĂšcle, 1498-1614, Montpellier, universitĂ© Paul ValĂ©ry-Montpellier III, 1981 ; Ellery Schalk, LâĂ©pĂ©e et le sang. Une histoire du concept de noblesse vers 1500-vers 1650, Champ Vallon, Seyssel, 1996 ; Kristen B. Neuschel, Word of Honor. Interpreting Noble Culture in Sixteenth-Century France, Ithaca, Cornell University Press, 1989; Jay M. Smith, The Culture of Merit Nobility, Royal Service, and the Making of Absolute Monarchy in France, 1600-1789, Ann Arbor, The University of Michigan Press, 1996. 35 LĂ©once de Pontaumont, Les olims de lâarrondissement de Cherbourg », MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© acadĂ©mique de Cherbourg, t. 13, 1879, p. 109. 36 MĂ©moires de Henri de Campion, op. cit., p. 82. 37 Madame de SĂ©vignĂ©, Correspondance, Ă©d. Roger DuchĂȘne, Paris, 1972-1978, t. 1, p. 38-39. 38 MĂ©moires de Henri de Campion, op. cit., p. 106. 39 Voir lâarticle dâHervĂ© DrĂ©villon, Publier nos playes et valeurs. Le fait dâarmes et sa notoriĂ©tĂ© pendant la guerre de Trente Ans 1635-1648 », La noblesse de la fin du XVIe au dĂ©but du XXe siĂšcle [âŠ], op. cit., t. 1, p. 289-308. 40 J. A. Lynn, Giant of the Grand SiĂšcle [âŠ], op. cit., p. 251. 41 Charles Dreyss, MĂ©moires de Louis XIV, pour lâinstruction du dauphin, Paris, Didier, 1860, vol. 1, p. 273. 42 Nous avons pu en retrouver un exemplaire Ă la bibliothĂšque municipale de Toulouse, Fonds ancien, cote C 292 65. Les citations du paragraphe en sont tirĂ©es. 43 SHD, A1 222, lettre du 14 juin 1668 citĂ©e par Camille Rousset, Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, Paris, Didier, 1861-1863, vol. 1, p. 148. 44 Michel VergĂ©-Franceschi Ă©d., Mes campagnes de mer sous Louis XIV par Philippe de Villette-Mursay, Paris, Tallandier, 1991. 45 Ibid., p. 419. 46 Ferenc Toth, Saint-Gotthard, 1664. Une bataille europĂ©enne, Paris, Ăd. Lavauzelle, 2007. 47 Madeleine Foisil, La parentĂšle et la clientĂšle du duc de Longueville », Yves Durand dir., Hommage Ă Roland Mousnier. ClientĂšle et fidĂ©litĂ©, Paris, PUF, 1981, p. 153-168. 48 Archives nationales, Archives du Palais de Monaco, J 46, microfilmĂ© en 590 Mi 322. 49 EugĂšne de Beaurepaire, Thomas Leroy et le manuscrit des Curieuses recherches [du Mont-Saint-Michel] », MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© des antiquaires de Normandie, t. 29, Caen, 1875, p. 682. 50 MĂ©moires de Henri de Campion, op. cit., p. 67-68. 51 GĂ©rard dâArundel de CondĂ©, Dictionnaire des anoblis normands 1600-1790, Rouen, chez lâauteur, 1976. 52 En rappelant que toutes ces donnĂ©es ne sont pas exemptes dâapproximations, car lâidentification de certains gentilshommes manque parfois de prĂ©cision. 53 Michel Le Pesant, ArrĂȘts du Conseil du Roi. RĂšgne de Louis XIV. Inventaire analytique des arrĂȘts en commandement, t. 1 20 mai 1643-8 mars 1661, Paris, Archives nationales, 1976, p. 48. 54 GĂ©rard dâArundel de CondĂ©, id., voir lâintroduction. 55 RĂ©my Villand, Analyse des papiers Le Gardeur de Croisilles et Le Louey conservĂ©s Ă Brillevast », Publications multigraphiĂ©es de la SociĂ©tĂ© dâarchĂ©ologie et dâhistoire de la Manche, fasc. 6, 1968, p. 61. 56 Remy Villand, Inventaire du chartrier de la famille de Morel », Publications multigraphiĂ©es de la SociĂ©tĂ© dâarchĂ©ologie et dâhistoire de la Manche, fasc. 58, Saint-LĂŽ, 1985, t. 1, p. 107. 57 En 1700 encore, lâintendant de Caen Foucault Ă©crit, Ă propos de lâĂ©lection de Carentan quâ il nây a point de contrĂ©e de la Normandie, et peut-ĂȘtre du royaume, oĂč plus de personnes de qualitĂ© et de distinction possĂšdent des terres et seigneuries ». CitĂ© dans Lâintendance de Caen en 1700 Ă©dition critique des mĂ©moires pour lâinstruction du duc de Bourgogne, Pierre Gouhier Ă©d., Paris, ComitĂ© des travaux historiques et scientifiques, 1998, p. 224. Auteur- Đ Ő«ĐœÎżĐŒ ŐźáŃŃáŃá«ŃĐŸ
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