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FondĂ©een 1966 par Maurice Nadeau et François Erval, La Quinzaine littĂ©raire se poursuit depuis 2013 dans la Nouvelle Quinzaine littĂ©raire. Regards critiques sur lâactualitĂ© de la
Vous avez peut-ĂȘtre vu le film de Jarmila Buzkova, Matisse et Picasso, la couleur et le dessin » sur France 5 le jeudi 1er mai. DĂ©solĂ©, votre navigateur ne supporte pas la balise vidĂ©o HTML5 en format MP4/H264 Sollers y participe briĂšvement, trop briĂšvement. Il y dĂ©veloppe des thĂšmes quâils aborde dans son roman LâĂclaircie. Je les ai Ă©voquĂ©s Ă plusieurs reprises cf. notamment Matisse/Picasso Ă la lumiĂšre de LâĂclaircie. Voici un trĂšs court extrait qui aurait mĂ©ritĂ© un plus long dĂ©veloppement que Sollers nâa pas manquĂ© de faire mais qui nâa pas Ă©tĂ© conservĂ© au montage. Il commence avec une reproduction des Figures au bord de la mer de Picasso 1931 [1]. DĂ©solĂ©, votre navigateur ne supporte pas la balise vidĂ©o HTML5 en format MP4/H264 La confrontation â le duel » â entre Picasso et Matisse est une figure quasi-imposĂ©e expositions, essais, documentaires, etc.. Confrontation dont il est bien difficile â et sans doute vain â de dire sâil en sort un vainqueur sinon la peinture elle-mĂȘme Ă la diffĂ©rence du duel par trop inĂ©gal entre Picasso et Braque [2]. Mais confrontation imposĂ©e par qui et pourquoi ? Eh bien, au-delĂ de la convention, par les peintres eux-mĂȘmes. Amis ? Ennemis ? Rivaux ? La question est plus Matisse, nĂ© en 1869, est plus ĂągĂ© que Picasso, nĂ© en 1881, il nâen est pas "le pĂšre" comme le rĂ©pĂšte un peu trop le documentaire de France 5, mais seulement lâaĂźnĂ©. Le pĂšre, câest CĂ©zanne CĂ©zanne est notre pĂšre Ă tous », dira Picasso, et Matisse câest une sorte de bon Dieu de la peinture ». Les deux peintres ont commencĂ© Ă peindre Ă peu prĂšs au mĂȘme moment, dans les annĂ©es 1890 le premier tardivement, le second prĂ©cocement. Nâest-il pas significatif quâil se rencontrent, pour la premiĂšre fois, en 1906, lâannĂ©e de la mort de CĂ©zanne ?Le dialogue exigeant, tendu, souvent ironique, entre les deux peintres, le Français et lâEspagnol, durera prĂšs de cinquante ans, jusquâĂ la mort de Matisse en 1954. AprĂšs quoi, Picasso, seul, reprendra, pendant prĂšs de vingt ans, et comme sâil avait toujours vingt ans, toute lâhistoire de la grande peinture occidentale â en prĂȘtant une attention toute particuliĂšre Ă Manet, le plus espagnol des peintres français. Mais câest une autre histoire [3]. * Le 28 octobre 1980, Marcelin Pleynet fait une confĂ©rence Ă la Fondation Juan March Ă Madrid Ă lâoccasion dâune rĂ©trospective des oeuvres de Matisse. Elle est publiĂ©e dans le numĂ©ro 87 de Tel Quel au printemps 1981 et reprise dans Les Modernes et la Tradition en 1990. Elle pourrait avantageusement servir de commentaire au documentaire de France 5. Pleynet revient sur la rencontre essentielle, sur les multiples rencontres, entre Picasso et Matisse dĂšs le dĂ©but du XXe siĂšcle. Oui, je suis convaincu que Matisse et Picasso dialoguent », Ă©crit Pleynet. Analyse. Tel Quel 87, printemps 1981. Cliquer sur les images pour agrandir [4]. par Marcelin Pleynet La confĂ©rence commence aprĂšs la prĂ©sentation de Marcelin Pleynet par son hĂŽte espagnol 65â CrĂ©dit Marcelin Pleynet. Je vous prie, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir excuser la sorte dâincongruitĂ© quâil y a Ă venir, dans son propre pays, parler dâun peintre dont on ne connaĂźt pas la langue et soumettre ses compatriotes au pĂ©nible protocole de la traduction. Je vous demande de mâen excuser et, de plus, de faire lâeffort de me comprendre ; de bien vouloir comprendre ce qui ici peut me servir dâexcuse. Lâhistorien comme le critique et lâamateur savent ce quâil en est des difficultĂ©s de traduction quâimpose lâapproche de la peinture, quâimpose la nĂ©cessitĂ© de traduire oralement la grandeur troublante et toujours en derniĂšre instance mystĂ©rieuse des signes plastiques que nous proposent les peintres et les sculpteurs. Et je dirais quâau-delĂ de cette Ă©vidence il nâest pas dâoeuvre dâart qui ne soulĂšve ce problĂšme de communication ; tel que lâon peut dire, si nous considĂ©rons lâhistoire de notre culture, que lâart produit tout Ă la fois un langage qui nâest quâĂ lui et aux professions qui auront pour tĂąche dâen faciliter plus ou moins, par traduction et adaptation, la communication. Les Italiens Ă ce propos jouent significativement des consĂ©quences de la traduction Traduttore/Traditore ». Peut-ĂȘtre que ce soir le filtre que ne peut pas ne pas constituer le passage de la langue française Ă la langue espagnole vous dissimulera-t-il mes propres errements. Choisir, Ă lâoccasion dâune rĂ©trospective de lâoeuvre de Henri Matisse, de vous parler de Matisse et Picasso, nâest-ce pas Ă©galement tenter de prendre une prĂ©caution supplĂ©mentaire vis-Ă -vis de ces erreurs de traduction, de ces traĂźtrises de bonne foi que sont le plus souvent les interprĂ©tations critiques ? Je nâai bien entendu pas lâinconsĂ©quence de penser vous rendre compte en une soirĂ©e de deux oeuvres aussi importantes et aussi complexes dont lâĂ©tablissement a dĂ©jĂ fait, et fait encore, lâobjet de nombreuses Ă©tudes je pense notamment Ă lâimportant ouvrage sur Matisse que termine Pierre Schneider, et au Catalogue raisonnĂ© de lâoeuvre peinte de Picasso dont Pierre Daix a Ă©ditĂ© cette annĂ©e un volume essentiellement consacrĂ© au Cubisme et qui sâarrĂȘte Ă lâannĂ©e 1916. Ne me considĂ©rant ni comme critique, ni comme historien, ni comme spĂ©cialiste, mais plus justement, et sans modestie aucune, comme amateur en ce que MallarmĂ© prĂ©sentait Baudelaire comme un amateur, je me permettrai de vous renvoyer Ă lâimportante documentation dâouvrages spĂ©cialisĂ©s consacrĂ©s Ă ces deux artistes pour tout ce qui concerne lâĂ©tablissement de leur Ćuvre. Et je me contenterai ce soir, si vous le voulez bien, de partager avec vous, en amateur donc, en amateur plus ou moins Ă©clairĂ©, les questions dâordre plus gĂ©nĂ©ral que ne peuvent pas ne pas poser les oeuvres de ces deux gĂ©ants de lâart moderne. Nous avons tout Ă la fois la chance et lâinfortune de nous trouver historiquement dans ce que je dirais la semi-proximitĂ© de ces deux oeuvres. Nous nâavons pas, comme quelques hommes aujourdâhui encore vivants, participĂ© Ă lâĂ©laboration de lâoeuvre de Matisse ou de Picasso, et nous sentons pourtant quâĂ ĂȘtre modernes ces deux Ćuvres participent encore par bien des aspects de notre contemporanĂ©itĂ©. Sans doute ceux qui connurent Matisse et Picasso connurent-ils deux artistes de gĂ©nie, mais ils les connurent, si je puis dire, dans les limites, dans la fragilitĂ© et dans lâincertitude du quotidien. Notre quotidien Ă nous ne les rencontre que dans lâĂ©vidence et la monumentalitĂ© de leurs oeuvres qui, bornĂ©es hier dans lâordre in progress » de la crĂ©ation, pourraient bien lâĂȘtre encore aujourdâhui et pour longtemps dans ce que je nommerais une aveuglante Ă©vidence. Choisir de parler ce soir de Matisse et Picasso, câest pour moi choisir, au lieu de la voie toujours de quelque façon exclusive de la passion, celle du dialogue. Comment deux oeuvres et deux hommes aussi apparemment dissemblables furent-ils avec une telle maĂźtrise et une telle grandeur contemporains ? Quâen est-il de cette apparence et quâen est-il de cette contemporanĂ©itĂ© ?Mais tout dâabord quâen est-il de cette apparence ? Nâest-ce pas la premiĂšre question que nous posent les arts visuels ? Nâest-ce pas dans la rĂ©ponse quâimplicitement nous apportons Ă cette question de lâapparence que nous qualifions les oeuvres dâart ? Certes, nous hĂ©ritons aujourdâhui de lâoeuvre de Matisse et de lâoeuvre de Picasso comme de deux grands monuments de notre culture. Mais devrons-nous nous contenter de reconnaĂźtre cela comme ces touristes qui traversent les musĂ©es en se contentant de lire, sur lâĂ©tiquette qui accompagne chaque tableau, le nom de lâartiste et le titre de la toile, sans plus prendre le temps de considĂ©rer lâoeuvre ? Devrons-nous dĂ©sormais nous contenter de vĂ©rifier lâidentitĂ© de Matisse, de Picasso et de leurs oeuvres sans plus nous laisser distraire de nos occupations ? Câest sans doute ce Ă quoi nous engage la semi-proximitĂ© dont je parlais tout Ă lâheure ; Ă considĂ©rer Matisse et Picasso comme deux monuments contemporains contournables dans la connaissance que nous pouvons avoir de leur identitĂ©. Est-on plus sensible au caractĂšre ibĂ©rique, et lâon se retrouvera dans la proximitĂ© de Picasso ; plus sensible au caractĂšre latin et mĂ©diterranĂ©en, et lâon se retrouvera sans autre question dans lâenvironnement de Matisse. Mais, Ă ĂȘtre bien lâun et lâautre attachĂ©s Ă ces particularitĂ©s, ne sont-ils que ces particularitĂ©s ? Leur Ćuvre ne prĂ©sente-t-elle pas une dimension qui justement tend Ă transcender ces particularitĂ©s dans lâinterprĂ©tation de ce qui les fait contemporains ? Nous connaissons tous la provocation de Matisse dĂ©clarant que lâart doit avoir quelque chose dâanalogue Ă un bon fauteuil ». Mais, outre que cette dĂ©claration de 1908 pourrait bien ĂȘtre une pointe adressĂ©e Ă Picasso les deux artistes ne se mĂ©nageaient ni lâadmiration, ni la critique, ni les piques, on peut ĂȘtre assurĂ© que si quelque jour Matisse a pensĂ© son art comme un bon fauteuil, il nâa jamais voulu dire par lĂ que ce fauteuil Ă©tait destinĂ© Ă des assoupissements. Lâoeuvre de Matisse montre assez combien il a su, et parfois rudement, le secouer, le fauteuil. Au-delĂ de la contemplation esthĂ©tique et de lâhĂ©donisme auxquels invite lâoeuvre de Matisse, sa contemporanĂ©itĂ© avec Picasso nous introduit objectivement au fond du complexe dĂ©bat sur lequel elle se constitue. Comme au-delĂ de sa constante prĂ©sence aux aventures et aux mĂ©saventures de notre siĂšcle lâoeuvre de Picasso, dans ce quâelle partage avec celle de Matisse, nous introduit Ă des contemplations tragiques au moins Ă©gales en sublimes grandeurs Ă celles du peintre de la Danse et de la Joie de vivre. Oui, je suis convaincu que Matisse et Picasso dialoguent. » Matisse, La joie de vivre, 1906. Picasso, La joie de vivre, 1946 [5]. Pour bien comprendre ce quâil en est de la dimension et de la vocation culturelles de lâesthĂ©tisme et de lâhĂ©donisme de Matisse, il nous faut nous arrĂȘter Ă ce quâil en est de la perception de lâhistoire et de lâactualitĂ© par un artiste. Pour un artiste, le monde passe par son art ; quel que soit lâartiste et quelle que soit la forme de son art le monde passe par son art comme son art passe par le monde. Lâeffort considĂ©rable, et sans doute inimaginable pour qui nây a pas accĂšs, quâimplique la crĂ©ation artistique dans un monde qui nây est pas prĂ©parĂ© et bien souvent la refuse, le pari absurde quâest Ă lâorigine la crĂ©ation artistique, impliquent que dans lâĂ©conomie de lâartiste tout soit soumis Ă lâordre de sa crĂ©ation. Mais cette soumission mĂȘme est une pensĂ©e du monde. Et câest bien me semble-t-il ce quâil faut entendre lorsque Matisse raconte quâen mai 1940, allant chez son tailleur, il rencontre Picasso qui lui dit Comment, vous ne savez pas que le front est complĂštement enfoncĂ© ? LâarmĂ©e a fait la culbute, câest la dĂ©bandade, les Allemands approchent de Soissons, demain ils seront peut-ĂȘtre Ă Paris. â Mais alors nos gĂ©nĂ©raux quâest-ce quâils font ? » demande Matisse ; et Picasso regardant sĂ©rieusement Matisse Nos gĂ©nĂ©raux câest lâĂ©cole des Beaux-Arts ! » Boutade sans doute, impromptu de Picasso quâil nous faut pourtant, comme lâindique bien son interlocuteur, prendre au sĂ©rieux. Tout aussi sĂ©rieusement que cette dĂ©claration dâHenri Matisse Ă son fils Pierre, le 1er octobre 1940 ... ce qui me prĂ©occupe, Ă©crit Henri Matisse, câest lâincertitude dans laquelle on vit et la honte de subir une catastrophe dont on nâest pas responsable. Comme a dit Picasso " Câest lâĂ©cole des Beaux-Arts". Si tout le monde faisait son mĂ©tier comme Picasso et moi faisions le nĂŽtre, ça ne serait pas arrivĂ©. » Nâest-ce pas lĂ donner Ă entendre quâau-delĂ comme en deçà de lâesthĂ©tique, lâĂ©thique de ce mĂ©tier fait Ă la fois histoire, culture et, par voie de consĂ©quence, sens ; et quâavec le plaisir quâelle nous procure lâoeuvre nous engage aussi dans une praxis. En 1929, Henri Matisse dĂ©clare Je crois Ă la possibilitĂ© dâun art en commun. Les dĂ©fauts des autres mâinstruisent sur les miens. Si travailler câest enlever quelques scories Ă la tradition, plus on est dâouvriers et plus cela ira vite. » On sait quâen faisant cette sorte de dĂ©claration Matisse pensait essentiellement Ă Picasso. Quâen fut-il donc de leur communautĂ© ?De leur diffĂ©rence et de ce quâils rivalisaient de gĂ©nie leurs contemporains les ont souvent opposĂ©s. Et lâon peut dire que cette opposition est mise en scĂšne dĂšs leur rencontre avec les collectionneurs qui vont dĂ©cider de leur fortune Ă tous les deux LĂ©o et Gertrude Stein qui, la mĂȘme annĂ©e, achĂštent le Nu bleu souvenir de Biskra et le Nu Ă la draperie. LĂ©o Stein dans un livre Appreciation quâil publie Ă New York en 1947 Ă©crit The homes, persons ands minds of Picasso and Matisse were extreme contrasts. Matisse â bearded, but with propriety ; spectacled neatly ; intelligent ; freely spoken, but a little shy â in an immaculate room, a place for everything and everything in its place, both within his head and without. â Picasso with nothing to say except an occasional sparkle, his work developing with no plan, but with the immediate outpourings of an intuition which kept on to exhaustion...Matisse was a social person rather than a convivial one. Picasso was more convivial than social. Matisse felt himse1f to be one of many, and Picasso stood apart, alone... Matisse exhibited everywhere. He always wanted to learn, and believed there was no better way than to see his work alongside the work of everybody else. Picasso never showed with others... » On sait que marquant cette opposition, les Stein, le frĂšre et la soeur, se partagĂšrent lâamitiĂ© et les oeuvres des deux artistes. Gertrude Stein sâĂ©tend longuement sur les anecdotes du duel, dâabord dans lâAutobiographie dâAlice Toklas, puis dans Matisse, Picasso and Gertrude Stein, enfin dans Everybodyâs Autobiography, livre qui confirme sa brouille avec Matisse. Mais quâen Ă©tait-il de fait de ces deux caractĂšres et de ces deux hommes ? Picasso, Science et charitĂ©, 1897. Si Picasso, nĂ© en 1881, est de douze ans plus jeune que Matisse, il est paradoxalement son aĂźnĂ© en peinture. NĂ© en 1869, on peut dire que Matisse nâa jamais touchĂ© un pinceau ni ouvert une boĂźte de couleurs avant 1890, câest-Ă -dire avant lâĂąge de 21 ans ; alors quâĂ lâĂąge de 16 ans, Picasso peint Science et CharitĂ© et voit tour Ă tour sa toile primĂ©e Ă lâExposition nationale de Barcelone en 1897, lui rapporter, toujours en 1897, une mention dâhonneur lors de lâExposition des Beaux-Arts de Madrid et une mĂ©daille dâor Ă celle de Malaga. On sait que Picasso nâa pas encore 20 ans lorsque sâouvre, en juin 1901, sa premiĂšre exposition chez Ambroise Vollard ; exposition prĂ©facĂ©e par le critique Gustave Coquiot. Un semblable Ă©vĂ©nement ne se produira dans la carriĂšre de Matisse quâen 1897 avec la Desserte ; Matisse a alors 28 ans. Matisse, La desserte, 1897. Câest Ă propos de la Desserte, qui fera scandale au Salon, que Matisse dira Le public dĂ©couvrit que jâavais des microbes au fond de mes carafes. » Je retiens ici la prĂ©cocitĂ© du talent de Picasso et la vocation tardive de Matisse dans la mesure oĂč, contrairement Ă ce que semblent dĂ©montrer les faits, ces Ă©lĂ©ments biographiques me paraissent dĂ©cisifs de ce qui distinguera bien sĂ»r, mais plus essentiellement rapprochera, les deux artistes, dans la mesure oĂč, dans un cas comme dans lâautre, selon deux modes de rapports Ă la crĂ©ation, se manifeste pour ces deux hommes une urgence devant laquelle ni lâun ni lâautre ne se dĂ©roberont. Nous nous trouvons ici selon deux modes dâĂȘtre confrontĂ©s Ă lâune des caractĂ©ristiques spĂ©cifiques de ce que nous nommons lâart moderne son caractĂšre dâurgence. De ce caractĂšre dâurgence on trouve, selon moi, le symptĂŽme dans la prĂ©cocitĂ© de Picasso et plus encore peut-ĂȘtre dans la commune et double dĂ©cision de son passage de Barcelone Ă Madrid, de Madrid Ă Paris. La prĂ©cocitĂ© de Picasso, câest dâabord celle dâune maĂźtrise acadĂ©mique ; le destin et les honneurs rĂ©servĂ©s Ă Science et CharitĂ© en tĂ©moignent. Et câest sans doute avec cette prĂ©cocitĂ©, mais plus encore dans la dĂ©cision de rupture et de rĂ©flexion implicite que suppose lâinstallation Ă Paris, que lâon peut voir Picasso faire face Ă lâurgence qui le dĂ©termine envers et contre tout câest-Ă -dire aussi contre sa propre prĂ©cocitĂ©, contre sa prĂ©coce habiletĂ© Ă ĂȘtre lui-mĂȘme. Matisse certes paraĂźt rĂ©agir diffĂ©remment. EngagĂ© dans des Ă©tudes dâavouĂ©, il passe brillamment son examen de capacitĂ© en droit, et ce nâest quâĂ lâĂąge de 21 ans, immobilisĂ© Ă la suite dâune opĂ©ration dâappendicite, et sa mĂšre lui ayant fait cadeau dâune boĂźte de couleurs, quâil commencera Ă peindre et dĂ©cidera dâabandonner le droit et de se consacrer Ă lâart. Matisse sâinscrit Ă lâAcadĂ©mie Julian oĂč enseigne Bouguereau en 1891. Il entre dans lâAtelier de Gustave Moreau en 1892. Il y a donc Ă peine un peu plus de cinq ans entre les premiĂšres Ă©tudes de Matisse dâaprĂšs Chardin et Ribera et lâexposition de la Desserte en 1897. Lâurgence, cette fois, apparemment commandĂ©e par la vocation tardive du peintre, est manifeste, et, comme souvent chez Matisse, si explicite, que lâartiste la prĂ©sentera lui-mĂȘme comme un des Ă©lĂ©ments moteurs de sa vocation. En 1952, lors de lâinauguration du musĂ©e qui lui est consacrĂ© dans sa ville natale au Cateau-CambrĂ©sis, Matisse dira Câest avec le sentiment constant de ma dĂ©cision, malgrĂ© la certitude de me trouver dans la vraie voie, oĂč je me sentais dans mon climat et non devant un horizon bouchĂ© comme dans ma vie prĂ©cĂ©dente, que jâai pris peur, comprenant que je ne pouvais reculer. Jâai donc foncĂ© tĂȘte baissĂ©e dans le travail, avec le principe que jâavais entendu toute ma vie Ă©noncer par ces mots "dĂ©pĂȘche-toi". Comme mes parents, je me suis dĂ©pĂȘchĂ© au travail, poussĂ© par je ne sais quoi, par une force que je perçois aujourdâhui comme Ă©trangĂšre Ă ma vie dâhomme normal. » Cette analyse, et cette admirable confidence, que nous livre Matisse Ă lâĂąge de 83 ans deux ans avant sa mort reste Ă mĂ©diter. Quelle sagesse incite alors le vieux maĂźtre Ă nous confier cette folie » qui gouverna sa vie la peinture. Et que cherche-t-il Ă nous dire en rapprochant cette urgence » qui le dĂ©pĂȘche dans sa vocation dâune force Ă©trangĂšre Ă sa vie dâhomme normal » ? Nâest-ce pas inscrire lâhĂ©donisme de la pure contemplation esthĂ©tique sur le fond dâune bien Ă©tonnante et bien dissonante perspective ? Cette conviction et cette force Ă©trangĂšre Ă la vie » de lâhomme normal, et telles quâon les retrouve chez Matisse et Picasso, font de ces artistes, je dirais des sensibilitĂ©s sismographiques de leur siĂšcle. Et nâest-ce pas dâabord en cela quâils dialoguent ? Nâest-ce pas cela que fondent, que portent et que qualifient les oeuvres dont nous devons aujourdâhui assumer tout Ă la fois lâhĂ©ritage et la grandeur lâurgence. Lâurgence bien entendu quâil y a pour un artiste Ă ĂȘtre lui-mĂȘme, ce lui-mĂȘme, celui-lĂ mĂȘme qui, comme le dit Matisse, aprĂšs Rimbaud celui-lĂ mĂȘme qui est Ă©tranger Ă la vie de lâhomme normal ». Celui-lĂ mĂȘme, ce je de lâartiste qui est normalement et anormalement un autre ». Notre proximitĂ©, notre semi-proximitĂ© avec ces oeuvres, ne nous fait-elle pas aussi les hĂ©ritiers de lâurgence qui les porta et dont jusquâĂ nous elles tĂ©moignent essentiellement aujourdâhui encore ? Urgence Ă se dresser tĂ©moignage force et pari de la grandeur de lâhomme de culture dans la misĂšre de lâhomme. Matisse dit-il autre chose lorsquâil oppose au mufle puant de la guerre qui va ravager lâEurope lâintĂ©gritĂ© de sa vocation Si tout le monde faisait son mĂ©tier comme Picasso et moi faisions le nĂŽtre, ça ne serait pas arrivĂ© » ? Câest dâabord en cela, me semble-t-il, que les deux oeuvres se rencontrent que les deux hommes et les deux Ćuvres se rencontrent, et que nous les retrouvons, que nous les rencontrons aujourdâhui encore aussi vivantes, aussi dynamiques, aussi pressĂ©es, aussi jeunes que quel mĂ©tier ? Et quâen est-il de ce mĂ©tier habitĂ© par une force Ă©trangĂšre Ă la vie de lâhomme normal ? Quâen est-il du mĂ©tier de peintre ? Quelle consĂ©quence y a-t-il Ă faire mĂ©tier dâune anomalie ? Quelles furent les conditions qui portĂšrent dans le mĂȘme temps lâEspagnol et le Français Ă donner cette dignitĂ© au mĂ©tier » quâils avaient choisi ? Recevons leur oeuvre avec lâattention quâimpose leur grandeur, et, disons le mot, leur majestĂ© ; mais sans oublier que cette grandeur et cette majestĂ© participent de la vie quâelles portent, et que nous ne saurions vĂ©ritablement reconnaĂźtre quâĂ la partager. Cette vie, la dĂ©claration commune de Matisse et de Picasso, devant lâhorreur dâune nouvelle guerre, nous dit bien quâelle se tisse dans le siĂšcle dâune force constructive de rĂ©sistance et dâhonneur. Faudra-t-il toujours quâelle soit vĂ©cue comme une anomalie ? Car câest bien de cela que tĂ©moignent les cris, les protestations et le scandale qui accueillent au dĂ©part deux artistes qui sont aujourdâhui les plus grands parmi les reprĂ©sentants de notre culture et la fiertĂ© de leur pays. Nâest-il pas Ă©tonnamment symptomatique que Matisse dĂ©finisse les qualitĂ©s proprement gĂ©nĂ©tiques de son Ćuvre en les dĂ©signant comme des microbes » le public dĂ©couvrit que jâavais des microbes au fond de mes carafes ». On sait, dâautre part, quâen 1913, Ă lâoccasion de lâArmory Show Ă New York, le Nu bleu souvenir de Biskra fut Ă ce point intolĂ©rable au public » quâil fut brĂ»lĂ© en effigie dans la rue. Matisse, Nu bleu souvenir de Biskra, 1907. De son cĂŽtĂ©, le cubisme ne donna-t-il pas lieu Ă une intervention Ă la Chambre des DĂ©putĂ©s de Paris contre des manifestations aussi nettement anti-artistiques et anti-nationales ». Et nous retrouvons ici Matisse et Picasso plus voisins que jamais faisant leur mĂ©tier comme nul autre. Mais, tout de mĂȘme, quel Ă©tonnant mĂ©tier ! Quel Ă©tonnant mĂ©tier qui construit, disons-le, ces Ćuvres sublimes sur un abĂźme ! Et quel abĂźme !A nous retrouver aujourdâhui devant la monumentalitĂ© de ces deux oeuvres, nous pourrions sans doute oublier avec et contre quoi elles furent rĂ©alisĂ©es ; mais nous y autoriseraient-elles ? Pourrions-nous encore les voir ? Pourrions-nous les voir sans les connaĂźtre ? Et leur semi-proximitĂ© ne nous signifie-t-elle pas aussi justement que cet abĂźme nous est encore bien proche ? Si nous cĂ©lĂ©brons lâannĂ©e prochaine le centenaire de la naissance de Picasso, nous ne pouvons pas oublier quâil y a tout juste un peu plus de sept ans quâest mort celui qui sera, nâen doutons pas, considĂ©rĂ© comme le peintre du XXe siĂšcle. Je dirais que le centenaire de la naissance de Picasso, câest le centenaire de la naissance de la peinture moderne, et quâen consĂ©quence, une fois encore, Matisse ne peut pas ne pas sây trouver associĂ©. Mais au-delĂ de cette association, en ce que, selon moi, ces deux oeuvres tĂ©moignent de notre civilisation et portent tous les germes de la culture moderne et contemporaine, je dirais que lâon peut dĂ©jĂ considĂ©rer le centenaire de la naissance de Picasso comme le centenaire de notre siĂšcle avec tout ce quâil comporta, et ce quâil comporte encore de crises et de tragĂ©dies ; un siĂšcle que nous avons pour charge de poursuivre et non pas dâ idĂ©alement si je puis dire, je me trouve seul avec la prĂ©sence et la mĂ©moire prĂ©sente de ces deux oeuvres monumentales, je ne peux pas mâempĂȘcher de penser quâau-delĂ de lâĂ©vidence contemplative quâelles imposent, sans la familiĂšre et inquiĂ©tant Ă©trangetĂ© de leur charme, elles mâentretiennent du dĂ©but dâun siĂšcle dont, sans doute, je ne suis plus mais que je nâemporte pas moins avec moi. Hier, elles firent scandale ; aujourdâhui, elles ne le font plus. Que sâest-il donc passĂ© ? Je devrais le savoir. Elles le disent, elles le savent, et le plaisir que jâai de les connaĂźtre et de les reconnaĂźtre sâen trouve confortĂ©. Lorsque Matisse dĂ©finit nĂ©gativement les qualitĂ©s mĂȘmes qui fondent son art microbes », anomalie » ne tend-il pas Ă nous signaler, par le dĂ©tour, Ă la fois le chemin que prend son Ćuvre et en quoi elle est Ćuvre de scandale ? Nâest-elle pas oeuvre de scandale par la nĂ©gation mĂȘme quâelle porte ? NĂ©gation que lâon retrouvera, chez tous les artistes du dĂ©but du siĂšcle, dirigĂ©e contre lâĂ©cole des Beaux-Arts et contre les acadĂ©mies. Mais, une fois encore, est-ce bien de cela quâil sâagit ? Certes, lâart de Matisse, comme lâart de Picasso, ne tarde pas Ă transgresser toutes les rĂšgles acadĂ©miques. Mais, ce faisant, que font-ils ? Et pourquoi le font-ils ? Par simple esprit de contradiction ? Par pur goĂ»t de la destruction et de lâanarchie ? Auraient-ils construit lâoeuvre quâils ont construite sâils eussent Ă©tĂ© les iconoclastes que lâon crut quâils Ă©taient ? Ceux qui sâen sont tenus lĂ occupent aujourdâhui leur place dans la rubrique des faits divers culturels et mondains. Nous savons bien, par ailleurs, que lâAcadĂ©mie ne manquait pas de ce quâil est convenu dâappeler de bons peintres. Bouguereau nâest assurĂ©ment pas un mauvais peintre, il y a pire parmi les modernes ». Alors ? Alors, je dirai que la rĂ©action de Matisse et Picasso, face Ă la catastrophe de 1940, est bien significative. Ce quâils reprochent aux peintres de lâĂ©cole des Beaux-Arts et de lâAcadĂ©mie, câest de ne pas bien faire leur mĂ©tier dans cette situation dâurgence » oĂč avec le siĂšcle ils sont prĂ©cipitĂ©s. Il suffit de considĂ©rer le climat culturel et social dans lequel furent Ă©levĂ©s, vĂ©curent et travaillĂšrent ces deux hommes pour se rendre compte combien lâillusion de stabilitĂ© et de continuitĂ© quâentretiennent alors les acadĂ©mies Ă©tait, disons le mot, mensongĂšre. Lâoptimisme euphorique de la civilisation industrielle, avec sa foi dans la raison et dans la science, connaĂźt alors ses premiĂšres crises. 1896 ouvrira lâĂ©poque quâil est convenu de nommer de la Grande DĂ©pression ». Lâunification de lâItalie et de lâAllemagne interviendront sur un marchĂ© jusquâalors dominĂ© par la France et lâAngleterre, et donneront lieu Ă une guerre Ă©conomique dont les consĂ©quences ne sont pas sans bouleverser les structures sociales et institutionnelles ; ce dont tĂ©moigne la fondation du syndicalisme en Belgique, les analyses des Ă©conomistes traditionnels et celles de Karl Marx, ou encore les dĂ©clarations du pape LĂ©on XIII rĂ©clamant lâinstitution dâune plus grande justice entre employeurs et employĂ©s. Câest lâĂ©poque du dĂ©veloppement du colonialisme que, par euphĂ©misme, on dĂ©signe comme dĂ©veloppement des sphĂšres dâinfluences. En France, Ă lâinstigation dâĂmile Combes, la loi de la sĂ©paration de lâĂglise et de lâĂtat est votĂ©e en 1905. Conduisant Ă la guerre de 1914 faut-il encore citer le climat raciste de lâaffaire Dreyfus de 1898 Ă 1906, le boulangisme jouant Ă lâintĂ©rieur la tension et lâaggravation des problĂšmes internationaux et des menaces de guerre ? Ce parcours, ĂŽ combien sommaire ! ces gros titres gĂ©nĂ©riques de bouleversements qui occupent le siĂšcle, ne sont-ils pas significativement Ă©loquents ? Picasso, Jeune fille nue avec panier de fleurs, 1905. Câest sur le fond de cette instabilitĂ© Ă©conomique, politique et culturelle que prend naissance lâĆuvre des deux artistes qui nous prĂ©occupent aujourdâhui ; et câest en fonction de ce quâils en vivent quâils peuvent effectivement revendiquer leur nĂ©gativitĂ© comme une Ă©thique poussĂ© par une force Ă©trangĂšre Ă la vie dâhomme normal », dira Matisse. Il serait Ă©videmment absurde de se demander ce quâil serait advenu de lâoeuvre de chacun sâils ne sâĂ©taient pas rencontrĂ©s. Pouvaient-ils ne pas se rencontrer ? Et nâest-il pas Ă©tonnant et significatif que nous sachions sur quoi ils se rencontrĂšrent ? LâannĂ©e mĂȘme de la mort de Paul CĂ©zanne en 1906, les Stein, qui ont dĂ©jĂ achetĂ© la Femme au chapeau de Matisse et la Jeune Fille au panier de fleurs de Picasso, commandent Ă Picasso le Portrait de Gertrude et lui prĂ©sentent Henri Matisse. Câest deux ou trois mois plus tard que Picasso verra la Joie de vivre au Salon des IndĂ©pendants. Matisse, qui vient de traverser et dâabandonner la contraignante influence du pointillisme, comme il le dit lui-mĂȘme, par nĂ©cessitĂ© de sâĂ©loigner de toute contrainte, de toute idĂ©e thĂ©orique », Matisse sâimpose alors comme le jeune maĂźtre dâune peinture qui sera qualifiĂ©e de Fauve », et il est Ă ce moment, comme lâĂ©crit Alfred Barr, un cĂ©zannien prĂ©maturĂ© » A. Barr ajoute il comprenait sans doute lâoeuvre de CĂ©zanne plus profondĂ©ment que Picasso, Derain ou Braque ne le faisaient alors... ». Quant Ă Picasso, non moins prĂ©occupĂ© par le maĂźtre dâAix-en-Provence, il vient de dĂ©couvrir cette mĂȘme annĂ©e au Louvre les sculptures ibĂ©riques dâOsuna, et le Bain turc dâIngres au Salon dâAutomne. De lâun Ă lâautre, de Matisse Ă Picasso, lâurgence » et la vigilance du mĂ©tier et de la vĂ©ritĂ© sâĂ©tablissent en ces annĂ©es dĂ©cisives. Picasso nâa pas pu ne pas voir, quasiment cĂŽte Ă cĂŽte, sur les murs de lâappartement des Stein le Portrait de madame CĂ©zanne et la Femme au chapeau de Matisse. En cette annĂ©e 1906, le parti pris que Matisse tire avec la Joie de vivre de lâĂ©tude du nu cĂ©zannien et du Bain turc de Ingres justifie effectivement A. Barr de qualifier Matisse de cĂ©zannien prĂ©maturĂ© ». Nâest-ce pas dĂšs 1899 que Matisse acquiert le petit tableau des Baigneuses de CĂ©zanne aujourdâhui au Petit Palais dont il ne se dĂ©fera quâĂ la fin de sa vie, et dont la familiaritĂ©, la vision quotidienne, dut lui ĂȘtre dâune aide inestimable en cette Ă©poque dâinvention et de virtuositĂ© formelles. Picasso a-t-il alors vu chez Matisse la petite toile de CĂ©zanne ? Ne doutons pas que quelle que soit la diffĂ©rence de leur caractĂšre les deux hommes ne se soient immĂ©diatement reconnus et frĂ©quentĂ©s. Picasso a alors 25 ans et Matisse 37. Ne doutons pas quâils se soient retrouvĂ©s dans la jeune maturitĂ© qui les caractĂ©rise. Pierre Daix rapporte Ă ce propos un trĂšs Ă©clairant entretien quâil eut avec Picasso Tu allais souvent chez Matisse ? » Grognement Bien sĂ»r ! » Et Matisse venait au Bateau-Lavoir ? » Picasso sâĂ©loigna en silence et me fit signe de le suivre. Il me montra le portrait de Marguerite, la fille de Matisse, qui date de 1906-1907, et quâil avait sorti pour le faire photographier. Ăa ne te rappelle rien ? » Peut-ĂȘtre ai-je suivi son regard sur la toile. Elle a le nez de travers comme tes demoiselles. » Il rit comme quelquâun qui a rĂ©ussi son coup. Tu commences Ă savoir lire la peinture. Il faudrait pouvoir mettre cĂŽte Ă cĂŽte tout ce que Matisse et moi avons fait en ce temps-lĂ . Jamais personne nâa si bien regardĂ© la peinture de Matisse que moi. Et lui la mienne... » De ce double regard les oeuvres tĂ©moignent. Et pas seulement de lâĂ©change formel que souligne ici Picasso ; dans ce regard mĂȘme les Ćuvres tĂ©moignent de lâessentiel de ce qui nous prĂ©occupe ici, de la qualitĂ© dâun Ă©change. A gauche Ătude pour les Demoiselles dâAvignon, crayon et pastel. droite Ătude pour les Demoiselles dâAvignon. Printemps 1907. Philadelphie. Picasso, Les demoiselles dâAvignon, 1907. Cet Ă©change de regard et ce qui le qualifie se trouve, me semble-t-il, particuliĂšrement mis en Ă©vidence en ces annĂ©es 1906-1907. Matisse expose la Joie de vivre au Salon des IndĂ©pendants en avril 1906. Picasso termine le portrait de Gertrude Stein au milieu du mois dâaoĂ»t 1906. La conception des Demoiselles dâAvignon doit, sans certitude, se dater de lâhiver 1906-1907. Picasso ayant conservĂ© la quasi-totalitĂ© des dessins prĂ©paratoires et des Ă©tudes des Demoiselles dâAvignon, ce nâest que trĂšs rĂ©cemment que lâon a pu dĂ©couvrir la complexe genĂšse de lâoeuvre. Pierre Daix publie, dans son catalogue raisonnĂ© des peintures rattachĂ©es au cubisme de Picasso, deux dessins et deux toiles appartenant Ă la succession de Picasso, qui apportent en ce qui concerne la genĂšse des Demoiselles, et cette Ă©poque de vive invention picturale, de trĂšs prĂ©cieuses informations. De 1906-1907 le dessin et la petite toile 17,5 X 13,5 des Marins en bordĂ©e qui semblent bien effectivement prĂ©parer les Demoiselles dâAvignon et le dessin dâune tĂȘte de femme, que lâauteur nous dit ĂȘtre par son rythme et son tracĂ© totalement isolĂ© dans la production de Picasso », et oĂč lâon ne peut pas ne pas voir le regard aigu et lâexpĂ©rience vive et vite que Picasso pratique de la dĂ©monstration de Matisse. Nous touchons ici en ce qui concerne les deux artistes au secret le plus intime et je dirais mĂȘme quasi alchimique de la crĂ©ation. Les historiens dâart, Ă©blouis par cette admirable scĂšne primitive, nâont cessĂ© de dĂ©couvrir tĂ©moignages, documents, photographies... tout le tissu complexe et, disons-le, toujours en derniĂšre instance alĂ©atoire du fantasme. Picasso a-t-il vu la reproduction des cinq baigneuses de CĂ©zanne accrochĂ©e au mur de lâatelier de Derain ? A-t-il vu... Mais que nâa-t-il pas vu chaque jour ? Et comment le voyait-il ? Ce que nous savons avec certitude, câest quâil voyait les oeuvres de Matisse comme Matisse voyait les siennes dans, comme disent les Anglais, un challenge » Ă leur mesure. Ce regard oĂč le plus jeune surveille le plus ĂągĂ©, peut-ĂȘtre parce que plus ĂągĂ© et plus mĂ»r ; et oĂč le plus ĂągĂ© surveille le plus jeune parce que plus jeune et peut-ĂȘtre plus dynamique ; ce challenge », je dirais quâil eut pour eux les consĂ©quences les plus heureuses dans la mesure oĂč il redoublait ce que lâun et lâautre vivaient intimement lâurgence Ă©thique de leur situation dâartiste. Urgence challenge » que Picasso ne manque pas de tenir dĂšs lâhiver 1906-1907 dans ce qui peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme la mise en place et lâactualisation de la dimension mythique de lâhĂ©donisme matissien. La Joie de vivre est, comme on disait alors, une grande machine de 2m 40 x 1m 75. Picasso va sâengager dans une Ćuvre de 2m 43 x 2m 33 Ă porter le dĂ©bat formel au lieu cachĂ© de son actualisation. Picasso, Marins en bordĂ©e, 1906. Ce sera dâabord la notation des Marins en bordĂ©e, puis les projets des Demoiselles dâAvignon, titre dont lâeuphĂ©misme ne doit pas nous cacher quâinitialement Picasso passa de la bordĂ©e » au bordel. Le premier projet de Picasso est en effet prĂ©sentĂ© comme le Bordel dâAvignon ; dâoĂč les marins vont se trouver progressivement exclus pour laisser la place Ă ces fantastiques demoiselles ». Telle est, dĂšs 1907, la rĂ©ponse de Picasso Ă la Joie de vivre et Ă lâĂąge dâor de Matisse. Tel va ĂȘtre le dialogue de ces deux artistes engagĂ©s Ă dire la double vĂ©ritĂ©, lâurgence de la double vĂ©ritĂ© qui les constitue dans la crise, le dĂ©sĂ©quilibre de leur monde, le nĂŽtre peintres crĂ©ateurs dâimages et iconoclastes. Picasso, Les Demoiselles, croquis, hiver 1907. Ces mĂȘmes annĂ©es, qui furent comme lâon sait dĂ©cisives pour Matisse et Picasso, sont Ă©galement celles de la dĂ©couverte de lâart nĂšgre » qui jouera un rĂŽle considĂ©rable dans la torsion formelle et expressive des figures de Picasso. On a beaucoup dĂ©battu pour authentifier et attribuer Ă tel ou tel artiste français la dĂ©couverte de lâart nĂšgre », jusquâĂ ce que le beau livre de Jean Laude, la Peinture française et lâArt nĂšgre, vienne clore les disputes. Reste Ă souligner, au-delĂ du seul dĂ©bat formel, ce quâil pouvait en ĂȘtre, dans une sociĂ©tĂ© colonialiste et raciste, de cette appropriation et de cette mise en Ă©vidence de lâart nĂšgre ? Dâopposer Ă la toute confiante et Ă lâapparemment toute-puissante peinture acadĂ©mique un art de sauvage » ; ce quâil Ă©tait convenu dâappeler, nous dit Jean Laude, des fĂ©tiches barbares, des curiositĂ©s ethnographiques ». Câest dans la cohĂ©rence mĂȘme de leur oeuvre et de lâactivitĂ© de leur oeuvre, que Matisse et Picasso se trouvent ici une fois de plus associĂ©s et symptomatiquement prĂ©sentĂ©s comme les inventeurs » de lâart nĂšgre. Au-delĂ de lâanecdote historique, lâadage qui veut quâon ne prĂȘte quâaux riches se trouve une fois de plus vĂ©rifiĂ©. Comme se trouve vĂ©rifiĂ©e, au-delĂ des particularitĂ©s et du caractĂšre unique de lâoeuvre de chacun de ces deux peintres, une association en vĂ©ritĂ© dont la force, ponctuellement nĂ©gative, ne peut plus ĂȘtre interprĂ©tĂ©e quâĂ travers ce qui dĂ©sormais pour nous spĂ©cifie en chacune de ces Ćuvres notre culture. Dans lâordre de ce mode dâassociation spontanĂ©e, nâest-il pas tout aussi Ă©tonnant que, lĂ sans doute oĂč Matisse et Picasso se sĂ©parent le plus, que le cubisme, qui fut vraisemblablement baptisĂ© par un journaliste mal intentionnĂ©, que le nom mĂȘme de cubisme » ait Ă©tĂ© donnĂ© comme une invention » de Matisse ? En ces annĂ©es 1906-1907, nous ne pouvons pas ne pas voir le rapport dâintelligence et dâĂ©change entre Matisse et Picasso qui tĂ©moignent et surenchĂ©rissent de talent et de corrosive vĂ©ritĂ© ; bouleversant, avec ce qui subsiste dâhabitudes acquises et dĂ©sormais mensongĂšres, une image de lâhomme et une image du monde que, sans le savoir, lâhomme et le monde ont depuis longtemps abandonnĂ©es. En ce sens, on peut dire que ces deux artistes sont aussi des artistes profondĂ©ment rĂ©alistes, profondĂ©ment plus rĂ©alistes que le monde dans lequel ils vivent, et qui courent vers les catastrophes que lâon sait. Câest la vĂ©ritĂ© de leurs oeuvres, la stricte vĂ©ritĂ© de leurs oeuvres qui est intolĂ©rable au faux Ă©quilibre dont leur monde et le nĂŽtre aussi sans doute Ă sa façon maintient lâillusion. Entendons-nous je ne veux pas dire quâun nu de Matisse ou un nu de Picasso soient un nu ressemblant. Matisse, que la sottise nâĂ©pargna pas plus quâun autre, rĂ©pondit Ă une dame qui lui demandait ce quâil ferait sâil voyait dans la rue une femme ressemblant Ă lâune de ses peintures Mais, madame, je fuirais ! » Il nây a vraisemblablement ni chez Matisse ni chez Picasso vocation de ressemblance. Ce quâil y a par contre, chez lâun et chez lâautre, câest une incontestable vocation de vraisemblance. Leur art nous place systĂ©matiquement dans un espace oĂč les critĂšres qui nous sont communs viennent Ă faire dĂ©faut, il insiste essentiellement sur lâinadĂ©quation entre ce que nous vivons et lâimage que nous nous faisons de nous-mĂȘmes et de notre vie ; sur lâinadĂ©quation entre ce que vit le siĂšcle et lâimage quâil se fait de lui-mĂȘme. Et leur grandeur Ă tous deux nâest-ce pas dâavoir rĂ©ussi Ă imposer superbement la logique folle » de cette nouvelle, de cette autre image dressĂ©e contre la mĂ©diocritĂ© et la bĂȘtise dâun monde dont, aujourdâhui encore, nous savons si peu, pour ne pas dire que nous nâen savons rien. Oui, je suis convaincu que Matisse et Picasso dialoguent. » Matisse, Nu couchĂ©, 1907. Picasso, La femme couchĂ©e, 1938 [7]. Oui, je suis convaincu que Matisse et Picasso dialoguent. Et pour bien connaĂźtre ce quâil en est de ce dialogue, on pourrait non seulement comme Picasso le suggĂ©ra Ă Pierre Daix mettre cĂŽte Ă cĂŽte les oeuvres rĂ©alisĂ©es par lâun et lâautre en ces annĂ©es 1906-1907, mais encore lâensemble des deux oeuvres. Lâhistoire elle-mĂȘme nous y invite qui, Ă partir de 1906-1907, va plus ou moins rĂ©guliĂšrement, plus ou moins Ă©pisodiquement faire se rencontrer les deux hommes et les deux oeuvres. En 1918, Matisse et Picasso exposeront ensemble chez Paul Guillaume, avec une prĂ©face du mĂȘme Apollinaire. En 1919, lâexposition des aquarelles de Picasso chez Paul Rosenberg incite Pierre Daix Ă souligner une fois de plus lâenseignement que les deux artistes tirent lâun de lâautre La ressemblance avec le thĂšme de la fenĂȘtre ouverte, si fort chez Matisse depuis son installation Ă Nice, ne pouvait ĂȘtre tenue pour fortuite », Ă©crit Pierre Daix Ă propos de cette exposition dâaquarelles, et il ajoute Picasso avait pu voir des toiles de son aĂźnĂ© chez Paul Guillaume ou chez Bernheim-Jeune au dĂ©but de lâannĂ©e et y trouver lâincitation supplĂ©mentaire Ă sortir de ses propres limites. » Si les rapports entre les deux hommes et les deux oeuvres semblent plus distendus entre 1919 et 1930, ce nâen est pas moins immĂ©diatement Ă Matisse que pense la critique lorsque Picasso travaille toute une saison Ă rĂ©aliser des sculptures dont la Femme couchĂ©e reprend, nous dit Pierre Daix, les formes fluides venues abondamment dans la peinture, et en mĂȘme temps souligne une rĂ©fĂ©rence quasi directe Ă la sculpture de Matisse, Ă ce Nu couchĂ© de 1907 que Picasso avait remarquĂ©... Justement, en 1929-1930 Matisse Ă©tait revenu Ă la sculpture. Les contacts entre eux Ă©taient restĂ©s assez Ă©troits pour que Picasso soit au courant ». Ces contacts au demeurant ne cesseront pas et les artistes eux-mĂȘmes, comme leurs contemporains, nous en laissent un certain nombre de tĂ©moignages. La rencontre en 1940, telle que je lâai citĂ©e, Ă partir de ce quâen rapporte Matisse dans une lettre Ă son fils Pierre, manifeste clairement lâestime dans laquelle se tenaient les deux artistes ; et lâon peut ajouter que quoi quâil arrive cette estime ne se dĂ©mentira jamais. En 1944, câest sur lâinitiative de Picasso quâune toile de Matisse figure au Salon de la LibĂ©ration. En 1945, Matisse et Picasso se retrouveront Ă nouveau cĂŽte Ă cĂŽte Ă la fois au Salon dâAutomne de Paris et au Victoria and Albert Museum Ă Londres. Si, lors de la rĂ©trospective de Matisse au musĂ©e dâArt moderne de Paris en 1949, on sait que Picasso demanda de visiter lâexposition la veille du vernissage, une anecdote rapportĂ©e par Pierre Cabanne nous prĂ©sente Matisse dĂ©couvert par M. de la SouchĂšre dans les salles Picasso du musĂ©e dâAntibes, prenant des croquis de la Joie de vivre. Et si la chapelle de Vence semble un moment les diviser, nâest-elle pas dâune certaine façon Ă lâorigine du Temple de la Paix de Picasso Ă Valauris. Françoise Gilot a conservĂ© cet Ă©change de propos entre les deux peintres Mais pourquoi faites-vous ces choses-lĂ ? rĂ©pĂ©ta Picasso Ă Matisse. Je serais dâaccord si vous Ă©tiez croyant. Dans le cas contraire je pense que vous nâen avez moralement pas le droit ! » Pour moi, rĂ©torqua Matisse, tout cela est essentiellement une Ćuvre dâart. Je mĂ©dite et me pĂ©nĂštre de ce que jâentreprends. Je ne sais pas si jâai ou non la foi. Peut-ĂȘtre suis-je plutĂŽt bouddhiste. Lâessentiel est de travailler dans un Ă©tat proche de la priĂšre. » La dispute entre les deux hommes, Ă propos de la chapelle de Vence, est incontestablement riche dâenseignement sur ce qui fondamentalement les sĂ©pare, et plus profondĂ©ment encore les unit. Le malentendu quant Ă lâattitude humaine semble total, et pourtant nâest-il pas totalement transcendĂ© dans le sentiment quâils ont lâun et lâautre dâun art oĂč, superbement au-delĂ des idĂ©es, ils se retrouvent. Matisse dira Picasso Ă©tait furieux que je fasse une Ă©glise. "Pourquoi est-ce que vous ne feriez pas plutĂŽt un marchĂ© ? Vous y peindriez des fruits, des lĂ©gumes." Mais je mâen fiche pas mal jâai des verts plus verts que les poires et des oranges plus orange que les citrouilles. Alors Ă quoi bon ? Il Ă©tait furieux !... Je lui ai dit, Ă Picasso "Oui, je fais ma priĂšre, et vous aussi, et vous le savez bien, quand tout va mal nous nous jetons dans la priĂšre pour retrouver le climat de notre premiĂšre communion. Et vous le faites aussi." Il nâa pas dit non. » Le dĂ©bat, ce dernier dĂ©bat entre les deux grands artistes, dĂ©borde largement les idĂ©es qui sây expriment. Matisse ne nous le signale-t-il pas lorsquâil Ă©voque justement Ă ce propos le rapport quâil entretient avec la couleur jâai des verts plus verts... et des oranges plus orange... ». Câest bien prĂ©cisĂ©ment parce que le dĂ©bat excĂšde la mesure et la vĂ©rification de nature, oĂč viennent communĂ©ment se fixer les couleurs et les idĂ©es, et quâil implique, dans la rĂ©alisation oĂč se trouve alors engagĂ© Matisse, la dimension surnaturelle de leur art quâune fois de plus les deux peintres sây cĂŽtoient, sây opposent et sây retrouvent. Matisse meurt le 3 novembre 1954, et Picasso qui, au dire de ses amis, rĂ©pĂšte souvent Au fond, il nây a que Matisse... », abandonne lui aussi Ă sa façon le siĂšcle et se tourne vers dâautres sont dĂ©sormais les grands maĂźtres du passĂ© qui vont partager la contemporanĂ©itĂ©, la gloire et le monologue de ce grand maĂźtre du XXe siĂšcle. Courbet et Greco, dĂ©jĂ en 1950, ensuite, plus prĂ©cipitamment semble-t-il, Delacroix en 1955 les Femmes dâAlger, Rembrandt en 1956, VĂ©lasquez en 1957, Murillo en 1959, Manet en 1960-1970, participent dorĂ©navant Ă travers Picasso au grand tribunal de la modernitĂ©, telle quâincontestablement Ă travers Matisse et Picasso, Ă travers le Français et lâEspagnol, elle convoque dĂ©sormais pour nous aujourdâhui lâensemble de notre histoire. Marcelin Pleynet, Tel Quel 87, 1981. Matisse dans la Chapelle de Vence. La Vierge et lâEnfant. Dessin pour la façade la chapelle. Encre et gouache sur papier, 1951. MusĂ©e Matisse, Le Cateau-CambrĂ©sis. Photo 4 janvier 2018. Zoom cliquez lâimage. Picasso, Le Temple de la paix. 1. La guerre. Picasso, Le Temple de la paix. 2. La paix. * Les articles sur Matisse et sur Picasso sont trĂšs nombreux dans les livres de Pleynet. Signalons le dernier essai en date Essais et confĂ©rences, 1987-1998 les Ă©ditons Beaux-arts de Paris, 2012. En mai 2007, Marcelin Pleynet prononça deux confĂ©rences Ă Banja Luka Bosnie-HerzĂ©govine, la premiĂšre portait sur Matisse et Picasso », la seconde sur CĂ©zanne ». Ces confĂ©rences furent suivies dâune discussion, dont voici la video en bas de page. Sur Pileface, voir plus spĂ©cifiquement Matisse/Picasso Ă la lumiĂšre de LâĂclaircie Matisse dâautres points de vue Matisse, Lâinvitation au voyage Picasso by night by Sollers Picasso et les femmes *
Ateliersenfants / vacances de la Toussaint : Lâautomne dans le regard des peintres. Public · Hosted by Passage Sainte-Croix. clock. 2 Dates · Oct 27 - Oct 28 · UTC+02. Event ended about 2 days ago. pin. Passage Sainte-Croix. Nantes, France. Show Map
Exposition temporaire Alfred-Auguste Janniot 1889-1969, gĂ©nie de l'Art DĂ©co Exposition, Patrimoine - Culture, Peinture, SculptureïSaint-Quentin 02100ïDu 01/04/2022 au 18/09/2022DĂ©couvrez cette magnifique exposition temporaire au MusĂ©e des Beaux-Arts Antoine LĂ©cuyer, du 1er avril au 18 septembre 2022. AprĂšs lâArt Nouveau qui a vu Ă©merger de grandes figures individualistes comme le belge Victor Horta ou le français Hector Guimard, lâArt dĂ©co va promouvoir et consacrer le travail Ă plusieurs mains. La nouvelle architecture, clef de voĂ»te de tous les Arts », appelle alors Ă lâunion de tous les artistes sculpteurs, peintres, mosaĂŻstes, ferronniers, vitraillistes et grands dĂ©corateurs. Parmi les sculpteurs de cette pĂ©riode si fĂ©conde pour lâArt français, le MusĂ©e des Beaux-Arts Antoine LĂ©cuyer a dĂ©cidĂ© de mettre en lumiĂšre la figure dâAlfred-Auguste Janniot. Ce dernier est lâun des reprĂ©sentants majeurs de lâArt dĂ©co au mĂȘme titre que lâarchitecte-dĂ©corateur Jacques- Ămile Ruhlmann ou le peintre Jean Dupas. De Paris Ă New-York, il a multipliĂ© les chefs dâĆuvres pour les nombreux architectes qui le sollicitaient avec insistance Wallace Harrison Rockefeller Center de New-York, Michel Roux-Spitz, Pierre Patout paquebots Ile de France et Normandie, Albert Laprade MusĂ©e des Colonies, Jean Niermans, Aubert, Dastugue, Viard et Dondel Palais[...]
Lesartistes nous ont aidĂ©s de tous temps Ă le comprendre. Les peintres de plein air puis les impressionnistes ont rĂ©ussi Ă saisir dans leurs tableaux lâimportance de lâesprit des lieux. Câest grĂące Ă eux que lâon a encore aujourdâhui connaissance de la rĂ©alitĂ©, de la force, de la beautĂ© de Crozant dans les annĂ©es 1890-1900. Pourtant, les paysages ont profondĂ©ment changĂ©
L'impressionnisme, prisĂ© du grand public mais peu mis en vedette ces derniĂšres dĂ©cennies en France, fait un retour en force avec le festival Normandie impressionniste Ă partir de vendredi, 4 juin, une exposition au musĂ©e Marmottan Ă la mi-juin et la grande rĂ©trospective Monet au Grand Palais de Paris, Ă l'automne."C'est le retour en grĂące des impressionnistes", a dĂ©clarĂ© Ă l'AFP Jacques-Sylvain Klein, commissaire gĂ©nĂ©ral du Festival Normandie impressionniste et auteur d'un ouvrage faisant de cette rĂ©gion le berceau de ce mouvement pictural majeur nĂ© dans le dernier tiers du XXe phare de ce festival, "Une ville pour l'impressionnisme Monet, Pissarro et Gauguin Ă Rouen", sera inaugurĂ©e vendredi au musĂ©e des Beaux-Arts de Rouen. Elle prĂ©sentera jusqu'au 26 septembre quelque 130 oeuvres dont onze cathĂ©drales peintes aux diffĂ©rentes heures de la journĂ©e par Claude Monet au dĂ©but des annĂ©es la France, "les prĂȘts sont venus de tous les horizons, beaucoup des Etats-Unis, mais aussi d'Europe, du Japon, du Mexique", de musĂ©es comme de collectionneurs privĂ©s, a indiquĂ© Ă l'AFP Laurent SalomĂ©, directeur des musĂ©es de coup d'envoi officiel du festival, nĂ© sous l'impulsion de Laurent Fabius, dĂ©putĂ© socialiste de Seine-Maritime, sera donnĂ© samedi avec la crĂ©ation d'un tableau vivant gĂ©ant devant le parvis de l'HĂŽtel de Ville de Rouen."Monet vu du ciel" rĂ©unira participants qui s'employeront Ă reconstituer la toile de l'artiste "La CathĂ©drale de Rouen, effet de soleil, fin de journĂ©e" en portant chacun un fragment de toile Ă bout de bras, tournĂ© vers le sera filmĂ©e depuis un hĂ©licoptĂšre et un Ă©cran gĂ©ant retransmettra les vues de cette crĂ©ation Ă©phĂ©mĂšre. Un juge du Guinness World Records sera prĂ©sent pour estampiller cette performance comme "plus grand tableau impressionniste vivant au monde".Le festival, qui se dĂ©roulera sur quatre mois, prĂ©sentera environ 200 initiatives, autour de la peinture mais aussi de la musique, de la photographie, du théùtre, du cinĂ©ma et de la littĂ©rature. Des "dĂ©jeuners sur l'herbe" seront organisĂ©s dans toutes les communes normandes qui le souhaitent. La nappe sera fournie par les organisateurs. Un rouleau de 25 kilomĂštres de toile Ă carreau rouge et blanc a Ă©tĂ© commandĂ© pour l'occasion. Le 14 juillet, des guinguettes impressionnistes reprendront vie."J'espĂšre que cette manifestation aura le succĂšs qu'elle mĂ©rite", a dĂ©clarĂ© Ă l'AFP Pierre BergĂ©, prĂ©sident de l'association Normandie impressionniste. "On a fait un grand coup en rĂ©unissant la Basse et la Haute Normandie, Caen et Rouen", deux villes souvent rivales, a-t-il Paris, le musĂ©e Marmottan-Monet prĂ©sente Ă partir du 17 juin et jusqu'au 26 septembre une exposition sur "Monet et l'abstraction", mettant en regard des tableaux de Monet 1840-1926 avec des peintres abstraits de la seconde moitiĂ© du XXe prĂ©voit une autre exposition autour de Monet du 6 octobre au 20 fĂ©vrier. A peu prĂšs en mĂȘme temps que la grande exposition Claude Monet qui aura lieu au Grand Palais du 22 septembre au 24 par la RĂ©union des MusĂ©es nationaux RMN et le musĂ©e d'Orsay, l'exposition rĂ©unira prĂšs de deux cents oeuvres du peintre impressionniste dans les galeries nationales du Grand toile manquera. "Impression soleil levant" 1872 de Monet, qui a donnĂ© son nom au mouvement mais que le musĂ©e Marmottan n'a pas souhaitĂ© prĂȘter, prĂ©fĂ©rant l'exposer dans ses murs. La douceur impressionniste ne rend pas forcĂ©ment tendre.
5artistes qui rĂ©veillent lâautomne sur Artistics Par InĂšs Boittiaux âą le 15 octobre 2020 Le ciel fait grise mine ? Quâimporte, lâautomne sera survitaminĂ© ! Beaux Arts a sĂ©lectionnĂ©, sur le site de la galerie en ligne Artistics, cinq peintres Ă la palette explosive pour une saison haute en couleurs. Ahn Hyun-Ju : associations libres
Cet article date de plus d'un an. PubliĂ© le 08/07/2021 2231 Mis Ă jour le 08/07/2021 2232 DurĂ©e de la vidĂ©o 4 min. FRANCE 3 Article rĂ©digĂ© par dessins Daniel Lallemand - France TĂ©lĂ©visions Honfleur Calvados a inspirĂ© des gĂ©nĂ©rations d'artistes. Parmi eux, EugĂšne Boudin, considĂ©rĂ© comme le prĂ©curseur de l'impressionnisme. En Normandie, le ciel tourmentĂ© fait le bonheur des peintres depuis prĂšs de 200 ans. "Je regarde quand mĂȘme une application mĂ©tĂ©o, comme quoi la modernitĂ©, ça sert", dĂ©clare Daniel Lallemand. Le peintre pose son chevalet Ă Honfleur Calvados depuis plus de 20 ans. Il ne se lasse pas des reflets et des devantures colorĂ©es, malgrĂ© une mĂ©tĂ©o morose. "C'est un bon ciel pour peindre, il y a des nuances de gris qui sont fantastiques", explique-t-il. En matiĂšre de ciel, la rĂ©fĂ©rence s'appelle EugĂšne Boudin. Peintre nĂ© Ă Honfleur en 1824, autodidacte et radical, il abandonne la peinture acadĂ©mique pour se concentrer sur la couleur et les nuances. Sur la cĂŽte normande, il trouve le sujet parfait la plage de Trouville. "C'est ici que Boudin est venu peindre ses fameuses scĂšnes de plages", explique Karl Laurent, conservateur du musĂ©e Boudin Ă Trouville Calvados. GrĂące aux chemins de fer, l'aristocratie parisienne dĂ©couvre les joies de la plage. "Une station comme Trouville devient surtout un lieu de rencontre et de sociabilitĂ©. Les gens discutent, se rencontrent. On se montre dans ses plus beaux atouts", explique Karl Laurent. Boudin, l'enfant de Honfleur, aura passĂ© sa vie Ă peindre les ciels torturĂ©s.
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l automne dans le regard des peintres